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190 ÙTUDE SUR DON' QUICHOTTE ET PICKWICK-CLUB dans le roman de Dickens. M. Pickwick a rencontré dans une auberge un garçon qui lui a plu; il se l'est attaché comme valet de chambre. Samuel Weller, ou plutôt Sam, suit partout son maître, pour la plus grande utilité du rêveur idéaliste qui chaque jour, par sa générosité imprudente, se met dans d'assez mauvais cas. C'est toujours Sam qui l'en tire, Ignorant comme Sancho, Sam a comme lui le gros bon sens qui ne confond jamais les vessies et les lanternes. Comme lui, dévoué à son maître, il veille à ses besoins, il le morigène avec respect; souvent, il réussit à lui faire éviter des maladresses; et quand il n'a pu l'écarter du péril, ni l'empêcher de tomber dans le piège, il trouve dans son bon sens et son esprit pratique les moyens de l'en tirer, avec le moins de dommage possible. Sam, qui accompagne partout M. Pickwick, cause sans cesse avec lui, comme Sancho avec Don Quichotte; et, dernier trait de ressemblance, il a, comme Sancho, un tic bien amusant. Qui n'a ri des proverbes intarissables de Sancho qui, suivant son expression, en a plein le ventre? Sam ne parle point en proverbes, mais il termine tous ses discours par une histoire comique qu'il appelle à l'appui de son dire. Ces histoires, il en a un stock inépuisable pour toutes les situations où il se trouve. On dit que les pro- verbes sont la sagesse des nations ; c'est surtout celle des classes populaires et illettrées pour qui les idées générales n'existeraient pas, ou seraient difficilement saisissables, sans ces formules où elles se figent et se matérialisent pour se fixer dans les esprits les plus simples. Les histoires saugre- nues de Sam ont un caractère analogue. Ces drôleries imprévues nous révèlent ce qui représente chez les gens du peuple l'humour anglais, souvent si fin dans les classes éle- vées. C'est, par exemple, le condamné qu'on mène pendre