Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
470                        PÉLOPONÈSE.
agitée, inquiète ; le moindre souffle suffit pour exciter une tem-
pête sur ses ondes irritables, et l'on croit entendre le bruit du
canon de Don Juan dans le bruit sourd et prolongé des vagues
refoulées au sein des cavités du rivage. Entre ces deux golfes,
l'isthme de Corynthe, séjour aimé de Neptune , élève une frêle
barrière au moyen de laquelle le Péloponèse se trouve lié, comme
par un fil, au reste du continent. Il semble que ces deux mers,
si elles se savaient aussi voisines, pourraient d'un seul bond
confondre leurs flots ensemble. Sur le rivage opposé du golfe
de Corynthe, l'Hélicon et le Parnasse se dressent dans toute leur
majesté, et, plus loin, l'Ionie et son ciel renommé se devinent
aux clartés de l'horizon. Enfin, au delà du golfe Saronique, sur
l'extrême ligne de la haute mer, l'œil étonné aperçoit le promon-
toire de Sunium, et un peu plus rapprochés, le mont Penthélique
et l'Hymette sur les flancs duquel le rocher de Cécrops se des-
sine comme un point d'or, tant l'atmosphère est limpide! Existe-
t-il au monde un panorama plus magique et qui renferme à la
fois tant de lieux et tant de gloire? Lorsque, du haut de l'Acro-
Corynthe, on voit toutes ces choses confuses, flottantes, baignées
dans une vaporeuse lumière, on croit assister, en proie à l'illusion
d'un rêve splendide, au réveil des plus beaux jours de l'antiquité.
    Briarée avait consacré l'Âcro-Corynthe au soleil qui en fit à
son tour hommage à Vénus ; présent superbe et digne d'être
échangé entre des dieux. Les Corynthiens furent, au commen-
cement , de hardis navigateurs et fondèrent de puissantes
 colonies, telles que Syracuse et Corcyre. D'immenses richesses
et une grande renommée furent le fruit de leurs courses en mer.
Mais, une fois enrichis, ils n'écoutèrent plus la voix de l'ambi-
tion et ils renoncèrent aux lointains voyages. Les arts et la
poésie suffirent à les occuper, et leur ville s'orna de nombreux
et superbes édifices. Comme le peuple était enclin au plaisir et
que les femmes y étaient d'une incomparable beauté , Corynthe
devint en peu de temps le séjour le plus délicieux de la Grèce.
Ses habitants se souvinrent alors de la déesse qui présidait à
leur destinée et se livrèrent avec entraînement à son culte. Un
temple magnifique fut élevé à Vénus au sommet de l'acropole