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178 LA REVUE LYONNAISE Que de vers éternels je chante dignement Les plus rares beautez de ce grand bastiment. Donne jour à ces jours. Source de clairtez, donne Que la splendeur du vray sur ma page rayonne. O grand Dieu, donne-moy que je puisse sans peur Combattre corps à corps le mensonge et l'erreur. Que ma guerre en ce champ, ma course en cette lice, Commencée en travail, en plaisir se finisse! Vous, ô doctes esprits, du conflit spectateurs, Ne blasmez trop légers mes louables ardeurs. Je burelle mon dire, approuve le probable, Redargùe le faux, reçoy le véritable, Et veux qu'à la raison ayant preste serment Vostre jugement libre en juge librement. Dieu était avant le monde. Voici comment le poète traduit développe cette grande idée biblique : Avant que l'air espars entourast les campagnes, Que la lune guidast ses nocturnes compagnes, Avant qu'on vist ny l'air ny les chams entournez, D'eau les chams, l'air de ciel, que nuls corps fussent nez, Et qu'ayant douze fils, l'an vist naistre, comme ores, De chacun trente enfants, demy-blancs demi-mores; Dieu, sans antécédents, sans fin et sans milieu, Tout grand sans quantité, tout présent sans nul lieu, Qui tout voyant prévoit, qui tout libre propose, Qui tout bon entretient et provident dispose. Grand boucle resserrant les chaînons de ce Tout, De tout tenoit en soy le principe et le bout; Chez soy mesme habitoit. Tousjours en sa présence, Sa sagesse luisoit, paroissoit sa puissance. Bonté, beauté, grandeur, constance, vérité, Gloire, justice et paix hantoient sa Majesté. Le sacré Garde-seaux de son règne de vie Et son grand Conseiller luy tenoient compagnie. Car de sa propre essence, et sans germe, et sans jour, Il engendra son fils, et d'eux deux son amour, De personnes distinct, non d'estre et de puissance