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r                        LA REVUE LYONNAISE
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           Rien n'est grand, sinon l'homme, en cette terre basse,
           Rien en l'homme n'est grand, sinon que son esprit.
           A l'esprit regardant, le haut ciel il surpasse ;
           Et regardant au corps, il n'est rien plus petit !

           C'est afin de remplir, ô race limonneuze,
           Ton corps d'humilité, ton âme de vertu,
           Pourquoy portes-tu donc une veùe orgueilleuse,
           Et dedans un corps droit, un esprit si tortu ?

           Non content de ton estre, incroyable arrogance !
           Tu voulus estre tout, ô fol, tu l'as esté,
           Feu par ta convoitize, eau par ton inconstance,
           Terre par avarice, air par légèreté,

           L'Immortel aux Mortels presque a tout donné double,
           Mais n'a donné qu'une ame, ainsi pensez à vous.
           Si nous perdons un Å“il, l'autre en force redouble,
           Mais si nous perdons l'ame, hélas! que ferons-nous?...


    il y a des pages émues dans le Poème tragique, consacré au martyre
des Macchabées, et dans les Effusions de N.-S. Jésus-Christ, qui racon-
tent les douleurs de la Passion. Toutes les pièces de ce petit volume
sont caractérisées par une véritable exaltation religieuse, ce qui
n'empêche pas l'auteur de mêler agréablement la mythologie à la
Bible, en appelant le Christ Adonis et Phœbus, en faisant figurer les
Nymphes, les Faunes et Bacchus lui-même dans ses déclarations les
plus chrétiennes. C'était dans l'esprit du temps. On ne croyait pas
possible de faire de la poésie, sans emprunter plus ou moins son
personnel à l'Olympe grec et latin. Du Bartas avait essayé de
secouer le joug et devancé la noble tentative de Milton, mais Boileau
 fit pencher plus tard la balance en faveur du paganisme.


                                                      A. MAZON.

          {A suivre.)