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                         LE RÊVE DE PACÔME                          II

sieur, méfiez-vous des gens spéciaux. Ils savent leur métier... quel-
quefois, mais la routine, la routine..! pas d'idées, pas de goût! »
   Un des maçons l'avait entendu :
   « Pour sûr, bourgeois, » dit-il, en passant près de lui, « vous avez
une fameuse platine, mais il y a chez nous un proverbe qui dit : « À
« chacun son métier, les vaches seront bien gardées. » Le proverbe
a raison. »


                                  VII


   Le jour venu, Pacôme se souvint de son rêve, et réfléchit. Bien
que l'habitude de soutenir, selon les circonstances, le pour et le
contre, eût quelque peu altéré son jugement; bien que l'ambition
l'eût fait souvent s'écarter de la stricte probité; il avait un fond
d'honnêteté native qui avait résisté aux luttes du barreau et aux dis-
cussions politiques, et n'était pas entièrement dépourvu de bon sens.
(Ce que nous ne pourrions pas dire de certains orateurs influents et
trop vantés, ailleurs qu'à Micronie.)Il comprit donc qu'il ne suffisait
pas de parler longtemps sur un sujet pour avoir raison, et que l'esprit
de parti ne devait pas seul dicter la conduite d'un représentant du
peuple... même chez les Myrmidons.
   Il résolut donc de laisser régler la question militaire par les
hommes compétents.
   Son abnégation n'alla pas jusqu'à lui faire réfuter son discours de
la veille, non, certes ; mais il ne répondit pas aux observations du
Ministre de la guerre, et, renonçant à la satisfaction de renverser le
Gouvernement, il laissa ses collègues voter selon leurs propres inspi-
rations, et s'abstint.
   Les plans du Ministre furent approuvés, et les fonds demandés
pour leur exécution votés par une imposante majorité.
   Pacôme eut, d'ailleurs, quelques années après, tout lieu de se
féliciter d'avoir, une fois dans sa vie, oublié sa vanité d'orateur, et
sacrifié ses intérêts d'ambitieux.
   La République des Myrmidons fut attaquée par de puissants voi-