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154 BIBLIOGRAPHIE appliquant à la science de l'homme la méthode des sciences physiques, ne trouvèrent de certitude que dans les faits matériels et négligèrent la recherche des causes comme placées au-dessus de la sphère de la connaissance. Le premier philosophe que M. Ferraz nous présente est Garât, rhéteur habile qui réussit à enthousiasmer un nombreux auditoire par sa faconde méridionale. Ministre de la justice, puis de l'intérieur pendant les plus mauvais jours de la Révolution, chargé de lire à Louis XVI son arrêt de mort, il plaignit ce malheureux roi et admira ses vertus, mais n'en conserva pas moins ses fonctions, loua également Robespierre et plus encore Napoléon. Il reste peu de chose de son enseignement. Avec Laromiguière, la philosophie ne fait pas de bien grands progrès. Il a beau parler de principes et d'analyse, il ne s'élève pas au dessus du corps et de la sensation. Destutt de Tracy et Cabanis ne s'élèvent pas beaucoup plus haut. — Le premier était un ancien officier. Empri- sonné pendant la Terreur, il devait monter sur l'échafaud le 11 thermidor : le renversement de Robespierre deux jours avant le sauva. Rendu à la liberté, il continua ses études philosophiques, sans pouvoir se dégager des entraves du sensualisme. Cabanis ne s'en dégagea pas davantage ; médecin plutôt que philosophe, il a réuni dans son ouvrage des Rapports du physique et du moral, un grand nombre de faits de détail qui ne manquent pas d'intérêt. Mais, dès qu'il abandonne les faits pour la théorie, il tombe dans le plus grossier matérialisme. C'est ainsi qu'il voit dans le cerveau un organe qui digère les idées comme l'estomac digère les aliments. Il a sans doute disséqué des estomacs et y a trouvé des aliments. A-t-il trouvé des idées en disséquant des cerveaux : il aurait dû nous le dire.