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SOUVENIRS — 1813-1814-1815 333 chevaux '. Grand hourra parmi le peuple; selon lui nous étions sauvés ! Napoléon, sentant bien que Lyon était un point important à main- tenir, préleva ce qu'il put, sans trop s'affaiblir, de ses vieilles bandes pour nous les envoyer, et en remit le commandement à Augereau. C'est alors que, pour enflammer la confiance, on composa la Lyonnaise : Napoléon, roi d'un peuple fidèle, Nous sommes tous tes enfanls, tes soldats, etc. et qu'en présence du généralissime, le soir, dans l'opéra de Fer- nand Cortes, l'acteur L'Aine, faisant marcher ses vieux aventu- riers au geste de son épèe et s'avançant en face du parterre, criait, plutôt qu'il ne chantait : Vous êtes tous mes enfants, mes soldats! Allons, courons contre nos ennemis, Et nous les compterons, lorsqu'ils seront soumis, Et nous les compterons, lorsqu'ils seront soumis! Des bravos, des trépignements accueillirent ces patriotiques paroles; mais le grand nez d'Augereau, dans sa loge d'avant-scène, n'avait point l'aspect d'un nez heureux et tranquille. Sa martiale figure trahissait de sombres préoccupations. l Le 11 janvier 1814. « L'Empereur enleva sa cavalerie à l'armée du maréchal Soult pour eu renforcer la garnison de Lyon. Les ennemis, étaient, disait-on, à huit lieues de cette ville. Ces troupes, formées de deux divisions de cavalerie, partirent des Pyrénées à marches forcées. Quinze mille hommes d'infanterie partirent pour le nord, douze jours après » (De Labou'isse-Rochefort, Souvenirs de ma, vie ov. Mé- moires politiques et littéraires (1795-1826, 15e livraison, p. 113, Toulouse, 1847). (1814) 29 janvier. « Je frémis en relisant ton article sur Lyon. Les Lyonnais auraient signé l'actede refus de se défendre ; ils auraient ouvert tranquillement leurs portes aux Anglais et aux Cosaques !... Quoi ! ces braves Lyonnais qui furent si belliqueux contre les sanguinaires proconsuls qui opprimaient leur pays; qui ne cédèrent pendant un long siège, ni aux menaces, ni à la mitraille ; qui firent une résistance si héroïque, n'auraient-ils plus rien conservé de leur générosité et de leur bravoure ? Ne les aura-ton pas calomniés?... Peut-être Lyon a-t-il reçu des promesses et des espé- rances? Je le crois et je l'espère... J'ai le plus ferme espoir que cette ville se défendra et se défendra bien. La peur a eu sa part, l'honneur va avoir la sienne. » (P. 131, Loc. cit.) Le 20 janvier, le bruit de la prise de Lyon courait à Toulouse et dans tout le Midi. Comme on estimait à soixante mille hommes la garnison de Lyon, et qu'on savait que l'empereur s'était porté à son secours, on n'y croyait pas.