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                      DANS LE LYONNAIS                    I4I

forêt de Bondy dans le voisinage de la capitale. La marquise
avait assez fréquenté Lyon pour connaître le dicton popu-
laire, conservé jusqu'à nous, qui dit d'une personne disparue
quelle a passé par Vaise.
   La comtesse fit en bateau sur le Rhône, par un fort
mauvais temps, le trajet de Lyon en Provence. Sa mère,
reprise de ses anciennes terreurs, lui écrit le 19 avril :
« Mon Dieu, ma chère bonne, quelle pensée que celle de
« ce Rhône que vous combattez, qui vous gourmande, qui
« vous jette où il veut ! Ces barques, ces cordages, ces
« chevaux qui vous abîmaient dans un instant, s'ils eussent
« fait un pas : Ah mon Dieu ! que tout cela me fait mal !
« un bon patron vous eût mis à couvert dès qu'il aurait vu
« la bise si mutine : J'en avais un qui n J aurait pas fait un
« pas dans tous les périls que vous me représentez... Nous
« verrons bientôt comme nous nous démêlerons de ce
« fleuve si fier et si peu traitable. »
   En effet, Mme de Sévigné qui avait depuis plusieurs
années contracté l'habitude de ne plus se séparer de sa fille,
ne tarde pas à aller la rejoindre. Elle doit d'abord partir de
Paris le samedi 9 mai 1694, puis pour ne pas manquer la
messe le dimanche, elle remet son départ de Paris au lundi
r i mai. Arrivée à Grignan, elle écrit le 20 juillet à la com-
tesse de Guitaut, la châtelaine d'Epoisses : « Je partis le
« 11 mai, j'arrivai à Lyon le onzième jour, je m'y reposai
« trois jours, je m'embarquai sur le Rhône, et je trouvai
« le lendemain sur le bord de ce beau fleuve ma fille et
a M. de Grignan, qui me reçurent si bien et m'amenèrent
« dans un pays si différent de celui que je quittais et où,
« j'avais passé, que je crus être dans un château enchanté.
« Enfin, madame, jugez-en, puisqu'on n'y voit ni misère,
« ni famine, ni maladie, ni pauvres. On croit être dans un