Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
476                            ÉLOGE HISTORIQUE

d'État, le magistrat enfin, tous retrempent utilement leurs
forces au contact de la muse. Malheur a ceux que ces nobles
distractions trouvent froids et indifférents ; « plaignons-les
de n'avoir pas reçu de la nature des organes assez délicats
pour goûter de telles jouissances, et pardonnons a ceux qui,
plus malheureux encore, vont jusqu'à y voir un motif de dé-
mérite et de réprobation (p. 6). » Les Plaisirs d'un Solitaire
avaient devancé de quelques mois cette étude académique,
car notre confrère avait hâte d'augmenter sa part dans ces
trésors toujours ouverts pour la main qui sait y puiser ,
« et qui nous permettent, selon son expression, de nous
élever au-dessus de la foule vulgaire et de laisser, lors-
que nos corps sont réduits en poussière , un nom qui
retentisse encore quelquefois dans le monde des vivants (1). »
   -L'auteur a réuni, dans ce volume, différentes pièces, soit
en prose, soit en vers, comme il avait fait pour la Gerbe
littéraire. Du reste, toujours même facilité, même fécondité
d'imagination, et même pureté de goût. Dans Une nuit à
Ferney, petite localité du pays de Gex
               Que de sa lumineuse trace
               Son hôte ancien éclaire encor,
               Comme à nos yeux se change en or
               Tout nuage où le soleil passe, — P. 10.

il s'élève avec force' contre ces heureux bâtards de la litté-
rature, « qui gagnent plus d'argent, avec leurs misérables
rapsodies, que les plus grands écrivains n'en ont jamais
gagné avec leurs chefs-d'œuvre, » et il se console du scan-
dale de leurs succès, en songeant que la prodigieuse vogue
qui s'attache a leurs écrits, dure autant que la mode d'un
chiffon de femmes ou d'une coupe d'habit, un peu moins
même quelquefois, en sorte que ce sont proprement mar-
chandises et non compositions littéraires.
  (1) Vie littéraire, p. 14.