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282 DEUX ÉMEUTES AU XVIII9 SIÈCLE les coupables, quand ce même clergé n'a pas eu lui-même entre les mains l'usage d'une autorité temporelle. En 1745, la cour envoya le comte de Lautrec avec des troupes pour servir à rétablir l'ordre dans la ville. Le Consulat fut choqué des procédés et du ton de hauteur de ce seigneur. On écrivit à M. de Villeroy, qui par son crédit fit rappeler le comte de Lautrec. ÉMEUTE DE 1768. Lyon, le 29 novembre 1768. Avant-hier, dimanche, nous eûmes une émeute populaire, j'ai presque dit une sédition,qui fut vive et fort animée, et qui pou- vait aisément avoir les suilesles plus funestes. C'est au collège de l'Oratoire que sepassa la scène. Sur les quatre heures après midi, il s'y attroupa auprès de la voûte, au-dessous de la bibliothèque, près de cinq cents hommes armés de haches, qui se mirent à enfoncer la porte d'une ancienne congrégation qui est aujour- d'hui changée en une Ecole de médecine et de chirurgie dans le bas, et dans "le haut en une école de dessin; ils étaient, disaient- ils, animés à faire des recherches dans le local sous prétexte qu'on y disséquait tout vifs des enfants que l'on enlevait à leurs parents. Il est certain que le concierge de cette nouvelle Acadé- mie, chagriné par l'importunité des enfants du quartier, les menaçait brutalememenf de les faire disséquer par les élèves en chirurgie; pendant trois ou quatre heures ils furent les maîtres de faire ce qu'ils voulaient, et personne ne parut pour s'opposer à leur entreprise. La porte d'entrée fut bientôt mise en pièces, ils se précipitèrent dans l'intérieur, renversant et brisant tout ce qu'ils trouvaient sous la main; ils firent voler des pierres à coups redoublés jusque dans la maison des pères oratoriens, cassant les vitres du grand réfectoire et menaçant de tout mettre à feu et à sang. Sur ces entrefaites, ils trouvèrent dans les ar- moires de cette école des cadavres disséqués; cette découverte ne fait qu'animer leur rage, croyant voir partout les prétendus enfants enlevés.