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                     LE SONGE D'UNE NUIT D'HIVER             457

 deux antipodes. — Puis, brûle ces papiers — avant de t'en
 aller, comme eux, en cendres et en fumée !


                                  *
                                 **


     L'idée qu'on trouverait ces lettres et qu'on se moquerait
  de lui, fit bondir notre homme.
     Il alla droit au squelette suspendu au plafond, le décrocha
 le coucha sur le plancher, ouvrit délicatement le crâne, en
 tira non sans émotion, le paquet de vieux sentiments qui
 dormait là depuis de longues années sous la garde de
 Lisbeth, referma la cachette funèbre, la raccrocha au pla-
 fond, et vint se jeter dans son fauteuil, comme épuisé par
 ce suprême effort, après avoir mis les papiers près de lui
 sur sa table.
    Il resta longtemps comme assoupi devant cette épave du
 passé, hésitant encore à dénouer le ruban jadis bleu main-
 tenant quasi incolore, qui liait les lettres, se demandant s'il
ne valait pas mieux les jeter au feu sans les lire, brûler d'un
coup avec elles le cœur du coupable sans lui infliger préa-
lablement la torture.
    Machinalement, il ranima le feu à moitié éteint au foyer
de la cheminée. D'ailleurs il faisait froid. Etait-ce pour se
chauffer ou pour préparer le bûcher du vieil amour qu'il
avait saisi la pincette et le tisonnier?
    La flamme jaillit tout à coup d'une bûche d'olivier et
ses rayons illuminèrent la pièce; Lisbeth qui n'avait pas
encore repris son aplomb, sourit sous le Vila brevis, et les
crânes des hauts rayons, sortant de la pénombre, moih
trèrent leurs nez camards et leurs yeux caves.
    Claude parut tout étonné de se trouver en pleine lumière
   N " J , — Novembre 1893.                             2)