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                  LES BIBLIOTHÈQUES DE LYON                435



              Bibliothèque de M. de L***.

   M. de L***, dont je n'écrirai pas le nom en entier,
puisqu'il a voulu garder l'anonyme, est du nombre de ces
amateurs qui ont le courage de se séparer de leurs livres
de leur vivant ; mais ce courage se comprend. Il est un
moment dans la vie où, après avoir vécu avec tant de
charmes au milieu de ces vrais amis, les infirmités, la
vieillesse, la limite d'âge dans certaines fonctions et un
changement de résidence nous contraignent et nous for-
cent à cette cruelle séparation. On voudrait les garder —
mais on ne le peut pas. — On aimerait à les feuilleter, à
les palper encore, mais la main affaiblie n'en a plus la
force ; nos yeux demi-éteints ne voient plus, sans fatigue,
ces pages aux caractères parfois microscopiques qu'on
lisait avec tant de délices, — et il est aussi une heure su-
prême dans notre existence où chacun aime à se recueillir
et à se préparer, dans la prière et la méditation, au grand
et dernier voyage qu'il est de notre commune destinée de
faire. M. de L*** a donc vendu aussi ses livres, et il en
possédait plus de sept cents. Savant lui-même et haut
placé dans l'enseignement public, il avait formé sa collec-
tion avec un goût éclairé. Elle comprenait la théologie et
la controverse, la jurisprudence, la philosophie et Y économie
politique, Vhistoire naturelle, la botanique, la médecine, le
magnétisme, les mathématiques et les jeux, môme la science
culinaire..... S'il ne la cultivait pas lui-même, il savait offrir
à ses amis une hospitalité plantureuse et délicate. Brillât-
Savarin se serait plu à sa table et aurait feuilleté peut-
être avec sensualité des traités comme ceux-ci : 1 ° Science
du bien-vivre, ou Monographie de la cuisine, suivie de