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426                                 POÉSIE
Et tu les gardes, toi ! Rends-en grâce au feuillage,
     Objet de ta haine. Etourdi,
C'est lui qui t'a sauvé des ardeurs du midi
     Et des atteintes de l'orage.
Des sucs que j'absorbai, nul pour toi n'est perdu :
Chacun d'eux, aliment de ma sève épuisée,
Pendant les durs soleils en ombre t'est rendu.
La fraîcheur que j'attire, invisible rosée,
Descend de mes rameaux, comme un bien qui t'est dû,
Sur ta verdure ainsi par mes soins arrosée :
Grâce à Dieu, tout le reste est de même ordonné. »

Ce chêne, c'est l'Etat, —l'Etat bien gouverné.
                                                    A.   PÉAN.




                          LES        HOMMES

Un vieil auteur français, à belles dents mordu (i),
Versait ainsi le fiel que sa poitrine enserre :
« Je donne un besant d'or à tout homme sincère,
Pourvu que tout félon me donne un clou tordu !

« A tout preux chevalier j'offre un marc d'or fondu,
Si j'obtiens un denier de tout lâche adversaire.
Je promets des monts d'or au saint qui se'macère,
Si j'ai de tout tartufe un seul Å“uf frais pondu.

« Sans peine j'écrirai les vertus de notre âge,
Les nobles dévoûments, les actes de courage,
Sur un bout de papier pas plus grand que la main.

« D'un pain je nourrirais toutes gens de droiture ;
Mais à tous les méchants si je donnais pâture :
Venez chez moi, dirais-je à tout le genre humain ! »

                                                   PHILIBERT LE   Duc.


  (i) Pierre Cardinal, troubadour du xm« siècle.