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                        POÉSIE.

«   Crois-moi, mon fils, crois-moi, laisse dormir ta lyre,
«   Sur ses cordes n'éveille aucun frémissement ;
«   Nul ne t'écouterait, car la France soupire,
«   Et les bons sont livrés aux fureurs des méchants, »

Je n'écouterai point cette voix trop discrète,
 Non, je ne tairai pas les accents de mon cœur;
Un nom sacré pour tous, un nom cher au poète
Eveille en chaque fibre un chant plein de douceur.

Quand les mortels entre eux font une affreuse guerre,
Quand le bonheur a fui, que l'on souffre en tous lieux,
Du moins je trouve encor, dans l'âme de ma mère,
L'image de la paix et de l'amour des Cieux.

Si la gloire à mes yeux se montrait souriante,
Si des lauriers paraient mon front d'adolescent,
Ah ! j'en couronnerais ma mère triomphante
Et dirais : C'est le prix d'un amour incessant.

Mais le génie, hélas ! n'habite pas mon âme,
Mon luth ne jette pas de ces accents si beaux
Qu'ils réveillent le monde, et ces reflets de flamme
Qui font briller un nom au-delà des tombeaux.

Si Dieu ne m'a donné ni grandeur, ni génie,
Mère, si je n'ai pas de palmes pour ton front,
Je sens au fond du cœur, sans cesse rajeunie,
La flamme d'un amour que mes vers te diront.

Conserve intacte, 6 Dieu, ma lyre virginale,
Que nul souffle menteur ne la fasse frémir.
Ah ! brise-la plutôt avec ta main royale
Que de permettre au mal de jamais la ternir.

Car elle doit chanter d'une voix sainte et pure
Le chant le plus suave et le chanter toujours.
N'écoutant que la voix du Ciel, de la nature
Pour redire à jamais le plus doux des amours.