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AU MOYEN-AGE. 233 ceux du petit état, paysans ou manœuvres, dont ils rémuné- raient si largement les services. Leurs dépenses, en effet, devaient être souvent hors de proportion avec leurs res- sources. Et cependant ces dépenses, dont nos rôles peuvent donner une idée satisfaisante, n'étaient rien en comparaison de celles qu'exigeait le luxe, et dont ils ne patient pas. En effet, ils ne nous apprennent rien des frais spéciaux qui tombaient à la charge de la classe élevée : les chevaux, les étoffes, celles de soie surtout, les tapisseries, vaisselle d'or et d'argent, joyaux, pierreries, pelleteries, broderies, harnais de joute et de guerre, etc., toutes dépenses énormes pro- pres aux seigneurs de haut rang. Pour y subvenir les grands avaient, pour la plupart, ia richesse territoriale, les redevances féodales, les emplois lucratifs, et souvent, hélas! les contributions de guerre, les exactions sur leurs terres et le pillage sur la terre d'autrui ; ils pouvaient aussi compter sur la munificence du prince, qui laissait rarement ses fidèles serviteurs dans le besoin ; et cependant les exigences du luxe étaient telles que souvent aucune ressource n'y pouvait suf- Gre, et ainsi s'explique la détresse presque continuelle dans laquelle l'histoire nous représente certains seigneurs de ce temps. De l'ensemble de ces considérations ne peut-on pas conclure que si la classe populaire était plus heureuse en 1385 qu'au- jourd'hui, au point de vue des besoins à satisfaire, la classe moyenne, au contraire, l'était bien moins. Quant aux prin- ces et aux grands seigneurs, qu'on ose à peine comparer à nos modernes favoris de la richesse, leur condition n'était— elle pas relativement bien plus inférieure encore ? Aujourd'hui, grâce au nivellement qui s'est fait dans la valeur des choses, on ne trouve plus, il est vrai, de ces anomalies dans les conditions de la vie privée ; mais aussi il faut convenir que l'homme du peuple paie presque aussi