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CUAULKS. 451
interroger, pour discuter avec eux, car telle était son unique
manière d'étudier. La hardiesse de son intelligence l'initiait
promptement à des connaissances qui ne s'acquièrent que par
une longue expérience et des efforts persévérants. Ce fut
ainsi, par exemple, qu'il apprit la musique sans maître, et
parvint à posséder plusieurs instruments sans autre secours
que ces ouvrages élémentaires appelés Méthodes, où le doigté
se trouve indiqué plus ou moins mal ; mais loin de l'effrayer,
les difficultés malérielles enflammaient son ambition ; habi-
tué dès l'enfance à jouer avec elles, il en triomphait par
son opiniâtreté, et n'avait à vaincre que celles-là . Une sen-
sibilité excessive tourmentait sans relâche cette organisation
nerveuse. Le gazouillement d'une fontaine comme le bruit
d'un torrent, le murmure de la brise comme le mugisse-
ment de l'orage excitaient en lui des émotions incessantes.
Les pompeux aspects de la nature l'impressionnaient comme
s'ils eussent apporté à son oreille l'enchantement d'une divine
mélodie. Le soleil levant, avec ses teintes si fraîches, avec
ses vapeurs argentées; le soleil couchant, avec les flots de
poussière qu'il semble soulever dans l'atmosphère, le jetaient
dans des extases dont il ne revenait qu'en proie à une exal-
tation fiévreuse. Môme la simple contemplation d'une belle
œuvre d'art lui faisait éprouver un attendrissement réel, tant
l'heureuse harmonie des formes le pénétrait profondément.
Et que de fois ne le vit-on pas au bord d'une prairie, plongé
dans une admiration silencieuse, pleurer de plaisir sur une
modeste fleur autour de laquelle son imagination créait tout
un monde nouveau !
Ainsi organisé, pouvait-il échapper aux peines, du cœur?
non. Ce n'est point impunément que l'on reçoit de la na-
ture tant de dons, en môme temps précieux et funestes.
Un amour malheureux vint le saisir ; le trouble de tout son
être s'en accrut d'une manière déplorable. Sa polémique ci'