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TABLEAU DE LYON EN 1786. 313 plaît, prouve un grand usage du monde, et un grand savoir des convenances dans la maîtresse de maison qui permet qu'elle existe chez elle. Le spectacle est ici le principal et presque le seul amuse- ment; c'est le rendez-vous diurne de tous les gens occupés, c'est là qu'ils viennent se délasser l'esprit, et lier pour le soir quelques soupers aimables. Ce spectacle présente un bon en- semble ; mais vous savez que l'opéra-comique a chassé Mel- pomène et Thalie de presque tous les théâtres de la pro- vince. Le public qui fait de la comédie plutôt une récréation qu'une étude, préfère une jolie ariette bien chantée à une belle tirade, quelquefois mal rendue. Je suis trop poli pour décider, à Lyon, qu'il ait tout-à -fait tort; mais je gémirai avec vous sur ce goût exclusif, qui ne permet plus aux sujets de se former, et qui amènera tôt ou tard la décadence d'un art qui depuis longtemps est pour vous une occasion de gloire, et qui a toujours été pour moi une source de plaisirs. Afin de contenter tous les goûts, il a donc fallu faire ici marcher de front les trois genres : la déclamation, le chant et la chorégraphie. Ces deux dernières parties du spectacle lais- sent peu de chose à désirer : la première offre plusieurs su- jets remplis de zèle et d'intelligence, et auxquels il ne man- que que de bons conseils et plus d'encouragements pour dé- velopper des talents très réels, et faits pour honorer l'art dra- matique. Le directeur [M. Collot-d'Herbois ) est votre ami : ce mot renferme son éloge, et me dispense de vous répéter combien il est fait pour être celui de tous les gens de lettres, par les qualités de son cœur et de son esprit. Voilà , mon ami, une lettre bien longue, et cependant je ne vous ai point encore parlé du physique de la ville dont j'ai entrepris de vous crayonner l'esquisse. Mais cet objet n'est point de mon ressort. Assez d'autres sauront vous vanter l'agrément de sa situation, la beauté de ses édifices, l'éten- 20 *