page suivante »
112 UN CONFRÈRE DE MASSILLON de la religion, beaucoup d'éloquence, d'onction, de talent pour appliquer l'Écriture. « Le P. Maure, d'environ trente-deux ans, a une belle physionomie, l'air fin, le son de voix plus beau et plus sou- tenu, l'action plus agréable, une prononciation charmante, a puisé le christianisme dans les mêmes sources, car ils ont les mêmes principes et ont même étudié ensemble et de concert (16). » Huit jours après, le même chroniqueur bénévole, dont on nous excusera d'épuiser les renseignements, a surpris ses prédicateurs favoris, développant le même sujet; le dessein de leur sermon est identique et leur division est pareille. La voici : la crainte de la méprise dans la vocation, et la nécessité de consulter Dieu et ses ministres pour l'évi- ter, premier point; danger de cette méprise si ordinaire et si funeste, second point. « Le dedans du P. Massillon est plus fécond et plus riche ; le dedans du P. Maure est moins fécond et moins riche; il l'est cependant, mais le dehors du dernier l'em- porte de beaucoup par le son de la voix, la prononciation, l'action. L'onction des deux pénètre. » Ainsi la première appréciation de ce juge discret, fami- lier aux choses religieuses, se confirme, s'éclaire, se forti- fie ; elle ne variera guère, et s'il incline à placer au premier rang l'orateur de Saint-Gervais, il convient néanmoins que pour les dons extérieurs, la supériorité appartient et demeure à son rival ; et qui donc ignore que si l'action n'est pas toute l'éloquence, ainsi qu'osait l'affirmer Démosthènes, elle en (16) Cf. Sainte-Beuve. Porl-Royal, à l'appendice. — Causeries du lundi, t. IX.