Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
42e                         LA REVUE LYONNAISE

 tels que la mer ou de hautes montagnes, ou bien encore à des
 idiomes non latins, le roman n'a et ne peut avoir que des limites
 arbitraires qui varient suivant que l'on choisit comme caractère dis-
 tinctif tel fait linguistique plutôt que tel autre, (i) La division
 courante en langue d'oc et en langue d'oïl, ne répond donc pas à la
 réalité. Ce n'est qu'une création de notre esprit, et, en fait, il n'existe
 pas de ligne de démarcation entre les divers dialectes romans parlés
 en France. On l'a dit avec une rare précision, « ces dialectes se
 fondent les uns dans les autres, sans que l'on puisse voir nettement
 où l'un commence et où l'autre finit. » (2)
    Notre idiome, et c'est là précisément ce qui fait son principal
 intérêt, se trouve au point de fusion des parlers à'cc et d'oïl; il devait
 donc participer et participe en effet des caractères de l'un et de
 l'autre. Dès lors, il serait puéril de chercher à le rattacher à l'un
 plutôt qu'à l'autre. C'est un de ces dialectes mixtes qui se caracté-
 risent par la diversité du traitement subi par l'a latin, suivant qu'il
 se trouve ou non dans le voisinage d'un son mouillé; dialectes au
 bénéfice desquels un éminent philologue italien, M. Ascoli, a voulu,
 à tort ou à raison, — à tort, suivant moi, — créer une nouvelle
 division linguistique, à laquelle il propose de donner le nom de
franco-provençal.
    Je n'ai ni l'intention ni le loisir de refaire, à l'occasion du Terrier
de Saint-Germain, un travail paru ailleurs, mais il m'a paru inté-
 ressant de relever le plus brièvement possible les faits linguistiques
 nouveaux ou caractéristiques que présente ce document.


   (1) En veut-on un exemple? On sait qu'en lyonnais l'a latin persiste pur
 comme en provençal : lia, franc, blé; au contraire, tandis qu'en provençal c reste
 dur devant a : cavàl (caballum), en lyonnais, de même que dans le centre de la
 France, le son guttural fait place au son chuintant : chivàl, franc, cheval. (Cf.
 E. Philipon, Phonétique lyonnaise au xive s. Romania, 1884, pp. 542 et suiv.). Sui-
 vant que l'on aura choisi pour critérium l'un ou l'autre'de. ces phénomènes lin-
 guistiques, on devra classer notre idiome parmi les dialectes du Midi ou parmi
 ceux du Nord.
   (2) Paul Meyer, dans sa réponse à l'article de M. Ascoli, intitulé : Meyer e il
franco-provenzalc. (Romania, 1876, p. 505.)