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438           LETTRES D'HIPPOLYTE FLANDRIN

   La seconde observation, mon cher ami, je ne sais pas
bien sur quoi elle est fondée; car je crois— et nous croyons
toujours avec vous— que la recherche de l'harmonie, l'étude
de l'ensemble, est la première de toutes. Je ne me souviens
pas d'avoir jamais rien dit qui puisse contredire cela, si ce
n'est d'avoir recommandé quelquefois, comme le faisait
M. Ingres à l'atelier pour l'étude du modèle vivant, de
peindre autant que possible au premier coup, et par con-
séquent, morceau par morceau ; puisqu'il était en effet
impossible d'entreprendre la figure entière. Mais malgré ce
cas particulier, la maxime d'avoir l'Å“il partout n'en domi-
nait pas moins tout l'enseignement, et pour mon compte,
je crois que l'homme le plus exercé, le plus habile, ne doit
pas plus l'oublier que l'élève.

   Maintenant, autre sujet. Vous me demandez si je voudrais
prendre un jour vos trois articles et les porter à Théophile
Gautier. Franchement, voilà ce que je trouve triste! Je
trouve que cet homme est le meilleur critique d'art que
nous ayons en ce moment. Je lui trouve un sentiment fin,
juste et poétique, mais je ne sais pourquoi il me fait peur.
Cette intelligence si facile rit de tout, se moque de tout. Et
moi qui crois et aime sincèrement certaines choses, il me
semble que je serais mal à l'aise en face de lui. J'ai peut-
être tort, car bientôt je serai à sa merci. Mais j'ai peur.
Donnez donc cette commission à la personne dont vous
parliez, et s'il vous répond, faites-m'en part, je vous prie.
Ça m'intéressera beaucoup. Oui, écrivez-nous de temps en
temps, ça nous fera bien plaisir. Comment va Janmot et sa
belle fresque ? Faites-lui bien mes amitiés. Je vous dirais de
bon cœur la même chose pour Frenet, mais ça ferait
paraître trop noires mes horribles machinations ! Cependant,