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                           ORGUEIL                        151
cela fera à minuit, sur la rivière, une fort belle illumination
par ce sombre temps de dégel !
    « Ceux qui restent ici se chargeront en outre de bien
éclairer tous les étages du château et de faire grand vacarme
comme au retour d'une joyeuse chasse. Nos ennemis se-
raient bien peu curieux si chacun ne s'empressait pas de
grimper au donjon pour voir ce bizarre spectacle, abandon-
nant ainsi sans défense une partie du fort.
    « Ce fut dans la salle un éclat de rire sonore dont trem-
blèrent toutes les vieilles armures, et le bon vieux seigneur
lui-même, se départant un moment de sa gravité, rit silen-
cieusement dans sa barbe....
    « Le lendemain, comme les cloches des environs son-
naient la seconde volée d'appel pour la messe de minuit,
la sentinelle du donjon, qui, par un temps humide, sombre
 et glacé, se morfondait dans la lanterne de pierre, fit sou-
dain entendre le signal d'alarme et dégringola tout effarée
l'escalier en colimaçon qui aboutissait dans la vaste salle où
les chefs avaient déjà commencé à fêter joyeusement l'a-
vènement de Notre-Seigneur Jésus-Christ.
    « — Qu'as-tu donc vu, poltron ? — fit rudement sir
Pudding, — aventurier parvenu de la guerre de cent ans, à
mine patibulaire, que sa haute taille et la couleur de ses
cheveux avaient fait surnommer par les gens du Fossat le
 « Grand-Carotte. »
    « L'infortunée sentinelle, pour se donner du courage,
essaya d'articuler le fameux god damn, mais trébuchant ahu-
rie, elle alla tomber comme un bœuf assommé sous la table
 où ronflaient déjà deux ou trois, capitaines d'armes.

                              FRANCIS   MARATUECH.
      (A suivre).