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                LÉGENDES DE LA VILLE D'ARS.               283

 que, suivant la légende, on entendait jadis sonner au fond
 du lac... Si je traitais un pareil sujet sur un autre ton que
 celui de la plaisanterie, je prêterais assurément à rire à
 certains esprits forts, adversaires nés de la fameuse devise
 Credo quia absurdum, et qui, parce qu'une chose leur
paraît invraisemblable, en nient la possibilité. Cependant,
— car il y a des réserves a toutes choses, — j'ai maintes fois
 sérieusement recherché quelle pouvait être l'origine d'une
 semblable tradition, et, avec quelques personnes, j'ai cru
la trouver dans un fait bien connu. Au milieu du silence et
du calme de la nuit, il n'est pas rare d'entendre le son des
cloches des villages voisins ou même assez éloignés, qui,
glissant sur la surface du lac, apporte à l'oreille comme des
 bruits étranges et mystérieux qui semblent sortir du sein
 des eaux. Ne serait-ce point la, me disais-je, la source de
cette merveille tant répétée?.... Et je me reposais sur cette
explication, fermement persuadé qu'elle était la seule bonne,
la seule admissible
   Mais voilà que, de notre bibliothèque municipale, puits
sans fond, océan sans bords et receleuse impitoyable de
l'explication naturelle de tous les mystères, une voix étrange
arrive jusqu'à moi et me crie, sans nulle ménagement pour
mon amour propre :—Erreur /—Erreur ! Cette voix est celle
d'un homme dont j'ai déjà narré les ébats cynégétiques, et
dont ma bonne étoile veut que je compte encore ici les
exploits de pêcheur. A ma prière M. Gariel a bien voulu
détacher de ses Mémoires d'outre-tombe un feuillet dont je
suis heureux de me faire l'éditeur. Si c'était le disciple de
saint Hubert que j'eusse à mettre en scène, je n'oserais
point affirmer qu'on doive le croire sur parole       Mais un
pêcheur !... En a-t-on jamais accusé un seul de la plus inno-
cente hâblerie?