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                   RÉPONSE A M. L'ABBÉ ROUX.                   237

 Dans les dictionnaires et dans les éditions d'auteurs anciens?
 Mais cela ne me convainc pas du tout, car je sais par expérience
 comment se font les livres. Il suffit du saut d'un mouton pour
 faire sauter tout un troupeau. Nous avons déjà vu cela se pro-
 duire à propos du mot Segmiavi. On ne pourrait pas citer une
 seule édition où le nom des Ségusiaves soit ainsi écrit avant la
publication de mon mémoire sur les Origines du Lyonnais. Quand
M. Roux m'aura démontré, à l'aide d'un monument gravé des
premiers siècles, qu'il faut écrire Forum Julii, alors j'accepterai
cette orthographe pour Fréjus ; en attendant, je tiens pour Forus
Julii, d'autant plus volontiers que tous les noms dont parle M. Roux
sont écrits Foros en grec dans Ptolémée ; car mon contradicteur
aurait tort de croire que notre ancienne capitale seule porte ce
nom dans le géographe grec : il nomme plus de vingt villes du
même nom, tant en Gaule qu'en Italie et en Espagne. Le rai-
sonnement de M. Roux, en cette circonstance, ressemble beau-
coup à celui de ces académiciens qui avaient mis au concours
la question de savoir pourquoi le poisson mort pesait plus que
le poisson vivant, sans avoir vérifié d'abord si le poisson mort
pesait plus que le poisson vivant.
   Remarquez bien d'ailleurs que la question pourrait paraître
résolue pour Fréjus sans l'être pour Feurs. Nous avons en France
des localités qui nous offrent encore des diversités de ce genre ;
on écrit : Châtel-Aillnn, Châtel-Audran, et Château-Briand ,
Château-Chinon, Château-Gontier, etc.
   Au surplus, je ne vois pas pourquoi M. l'abbé Roux tient tant
au genre neutre. En quoi Forus fait-il une plus triste figure que
Forum ? Si nous en croyons la grammaire latine, le masculin est
plus noble que le féminin, et le féminin plus noble que le neu-
tre : donc Forus est à deux degrés, c'est-à-dire aussi haut qu'il
peut l'être, au-dessus de Forum.
   Je résume en deux mots ce débat. Supposez que nous sommes
à vingt siècles de l'an de grâce 1859. L'empire français a dis-
paru comme l'empire romain, ne laissant qu'une langue morte,
ayant donné naissance à vingt patois divers. Un barbare de ce
temps-là, né à Besançon, mais forcé par les nécessités de la vie