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'ÃŽ48              LETTRES SUR LA SARDAIGNR.

rées s'éparpillent bien un peu à droite et à gauche, mais la
vie, le mouvement, le commerce, ne sortent pas du Corso.
Là, sur des dalles en losange, et polies comme celles de Gê-
nes , passent et repassent sans cesse , et les beaux Catalans
d'AIgher , et les marchands de Tempio, avec des ceintures
hérissées d'armes éclatantes, et les fruitières, les bras nus, la
jupe galamment retroussée , la tête encadrée dans des au-
réoles de fruits et de fleurs, et les porteurs d'eau , poussant
devant eux des miniatures d'ânes , et des soldats piémontais,
et des étudiants enfouis sous les plis d'un petit collet cou-
ronné d'un tricorne, et les citadins, en habit bleu, en chapeau
rond ; enfin , une foule incessante , courant des marchés aux
églises , des églises aux cafés , des cafés à l'Université , au
théâtre. Mais c'est le dimanche , surtout , quand les offices
 religieux sont terminés , que le Corso offre un coup-d'ceil
charmant et animé. C'est alors une confusion, une mêlée
chatoyante de chapeaux empennés, de rubans incarnats, de
bonnets rouges , de mantilles de taffetas changeant , de cas-
ques étincelants , d'aigrettes diamantées, un véritable ruis-
seau de velours, d'or, de perles et de bijoux, roulant entre
deux rangs de chaises. Les conversations bourdonnent et se
mêlent ; les saluts, les œillades se croisent en tous sens ; les
éventails espagnols s'ouvrent et palpitent sous les doigts des
promeneuses, comme les ailes d'un pigeon ; les balcons, cou-
verts de grands (apis qui flottent au vent, se garnissent de
curieuses, et ressemblent à des corbeilles de fleurs ; les airs se
parfument des senteurs féminines , des tubéreuses el des
violettes, tandis qu'à l'extrémité de la promenade, la musique
militaire fait entendre ses bruyants accords.
   Sassari a l'aspect d'une ville continentale ; les monuments
anciens tombent en ruine; les édifices modernes qui les rem-
placent, sont mesquins et vulgaires ; les nombreuses cons-
tructions qui s'élèvent, n'ont ni tournure ni caractère; et déjÃ