Sommaire :

    Évolution de l'Anatomie de la mélancolie.

    En novembre 2000, la Bibliothèque a acquis aux Etats-Unis la 7e édition de The Anatomy of Melancholy, parue chez Parker en 1676.

    L'Anatomie de la mélancolie, ouvrage fondamental de la littérature anglaise, est une immense encyclopédie dans laquelle Robert Burton (1577-1640) a tenté d'inclure tout ce qui était connu sur l'homme et le monde à la fin de la Renaissance. Les six éditions successives de l'Anatomie montrent bien comment ce théologien anglican, bibliothécaire de Christ-Church, Oxford, désireux d'invoquer toutes les opinions publiées et incapable de cesser son travail de compilation, parvint à intégrer à son texte plus de 13 000 citations d'environ 1600 auteurs.

    Robert Burton acheva la première rédaction de son Anatomie de la mélancolie par uneConclusion de l'auteur au lecteur, à la suite de laquelle il mit son nom, puis la date : From my Studie in Christ-Church Oxon. Decemb 5. 1620. La première édition de l'Anatomie, dédiée à son protecteur, Lord Berkeley, fut publiée par Henry Cripps, à Oxford, en 1621. Le volume, imprimé par John Lichfield et James Short, est un in-quarto de 880 pages et de 353 369 mots. Peu après la publication, Burton commença le processus d'accroissement de l'Anatomie en y ajoutant du texte à tous les niveaux, tantôt un seul mot, tantôt des paragraphes entiers, afin d'augmenter le nombre de ses exemples, de citer d'autres auteurs faisant autorité et d'affiner son analyse.

    Lorsque la deuxième édition fut publiée par Cripps en 1624, également imprimée par John Lichfield et James Short, le livre contenait 423 983 mots et était devenu un in-folio de 652 pages. Burton avait laissé tomber sa Conclusion de l'auteur au lecteur et il avait inséré une grande partie de celle-ci dans la préface intitulée Démocrite Junior au lecteur. Il y avait tant et tant de révisions dans cette préface que Burton la corrigeait encore alors même qu'on imprimait le livre. Il corrigea aussi les erreurs de la dédicace et ajouta un index thématique.

    Pour la troisième édition, imprimée par le seul John Lichfield et publiée par le même Cripps en 1628, il y eut deux importants ajouts: le premier est la page de titre gravée par Christof Le Blon, suivie par deux poèmes, Démocrite Junior à son livre et le Précis de mélancolie par l'auteur; le second est l'exhortation en latin à la fin de la préface,Au lecteur fâcheusement oisif. L'Anatomie avait continué à grandir en taille - 762 pages in-folio et 476 855 mots, Burton cependant indiquait que ce serait la dernière édition : Mais j'ai résolu de ne plus jamais rééditer ce traité par la suite,ne point trop en faire, je cesserai d'ajouter, de transformer ou d'enlever, j'en ai fini.

    Frontispice gravé par Christophe Le Blond (1628) pour The Anatomy of Melancholy de Robert Burton London, Parker, 8ème ed., 1676 (BM Lyon, Rés. 167407).

    Il se révéla cependant incapable de tenir cette résolution - bien qu'il l'ait laissé figurer dans toutes les éditions qui suivirent. Dans la quatrième édition, que l'on doit aux mêmes éditeurs et imprimeurs, en 1632, Burton ajoutaL'Argument du frontispice avant la page de titre de Le Blon, qui fut complétée par des chiffres correspondant aux explications des emblèmes contenus dans L'Argument. Il augmenta aussi la fin de la préface du poème "Pleure donc Héraclite" ; le livre contenait désormais 822 pages in-folio et 505 592 mots.

    L'imprimeur londonien Robert Young, imprimeur royal pour l'Ecosse depuis 1632, avait apparemment été autorisé par Burton à publier une édition à Edimbourg. Young avait imprimé 346 pages quand les imprimeurs d'Oxford firent arrêter l'impression ; Burton fit envoyer les feuillets à Cripps ; 68 de ces feuillets furent réimprimés à Londres par Miles Flesher parce que Burton y avait une fois de plus intégré des corrections ; quant aux feuillets restants, ils le furent par Leonard Lichfield et William Turner à Oxford. Pour cette cinquième édition, publiée par Cripps en 1638, le taux d'accroissement avait diminué : 842 pages in-folio et 514 116 mots.

    La sixième édition, imprimée à Londres par R.W. (Robert White), fut publiée par Cripps à Oxford en 1651 et à Londres en 1652, ces éditions ne différent entre elles que par la page de titre. Cette sixième édition intègre environ 2 268 mots ajoutés par Burton à un exemplaire de 1638 qu'il donna à Cripps avant de mourir, en 1641, soit un total de 516 384 mots.

    Cripps publia une édition de l'Anatomie à Londres en 1660 et la dernière édition du dix-septième siècle fut publiée en 1676 par le libraire londonien Peter Parker. Cette huitième édition est imprimée en doubles colonnes. Aucune autre édition de l'Anatomie ne fut publiée avant 1800. Quarante-huit éditions furent publiées au dix-neuvième siècle, dont la plus célèbre, en trois volumes, établie par Arthur Shiletto et publiée par George Bell & Sons en 1893 ; un grand nombre de citations y sont identifiées pour la première fois.

    D'innombrables éditions ont vu le jour au vingtième siècle, tout particulièrement les trois magnifiques volumes d'Oxford University Press, 1989-1994, établis par Thomas C. Faulkner, Nicolas K. Kiessling et Rhonda L. Blair ; cette publication contient la collation des six éditions de l'Anatomie, suivi des trois volumes d'appareil critique de J.B. Bamborough, 1998-2000.

    L'Anatomie de la mélancolievient d'être traduite intégralement pour la première fois en France (Paris, Éditions Corti, 2000 ; préface de Jean Starobinski, postface de Jackie Pigeaud, traduction de Bernard Hoepffner avec la collaboration de Catherine Goffaux).

    La Bibliothèque municipale de Lyon a récemment acquis la 7e édition de The Anatomy of Melancholy éditée chez Parker en 1676. Cet ouvrage était en vente chez John Gach Books aux Etats-Unis, un collectif de libraires d'ouvrages anciens.