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32 LA REVUE LYONNAISE
triomphe total ou partiel des doctrines radicales, et prenant Ã
Mazzini le prétexte dont se couvrait cet habile agitateur, je veux
dire l'indépendance de la péninsule, il ne lui laissa que la res-
source des mauvaises passions et des haines religieuses. Déjà , en
1849, après la défaite de Novare, il écrivait à la comtessede Cir-
court : « Le Piémont, après de magnanimes efforts, a succombé sous
les coups de l'Autriche,moins à cause des forces de ses ennemis que
par suite de l'incomparable impéritie du parti ultra-démocratique
qui s'était emparé du pouvoir. Ce parti lâche et imbécile a tout fait
pour nous perdre. Il a tout désorganisé et n'a su tirer aucun parti
des éléments de force quepossédait le pays. Trahi par le roi Charles
Albert, mal secondé par l'immense majorité du pays qui parta-
geait ses opinions, le parti modéré a été obligé de céder le pouvoir Ã
des démagogues sans énergie et sans talent qui croyaient bêtement
qu'une nation peut reconquérir son indépendance et sa liberté
par des phrases et des proclamations... »
Dans ces lignes, on voit éclater une haine vigoureuse de Mazzini,
qui avait pourtant réussi à s'attirer la bienveillance coupable ou
aveugle d'hommes tels que Vincenzo Gioberti. Aussi Cavour
appelait les mazziniens : « ces funestes ennemis de la régénération
italienne. »Et il avait raison. Le triomphe de sa politique, quand il
arriva au pouvoir, fut précisément d'affaiblir les républicains, en
acceptant celles de leurs idées qui étaient acceptables. Et si au-
jourd'hui, cette faction a en Italie très peu de partisans, la monar-
chie de Savoie peut en remercier l'homme d'État, qui mieux que
Guizot,sut, sans exercer le pouvoir royal, faire à ses adversaires
de sincères concessions, par lesquelles il les réduisit à l'impuissance
ou à la violence qui est le signe de la faiblesse.
III
Pendant les premiers temps de sa carrière parlementaire, le comte
de Cavour, sorti des rangs de la droite, s'était principalement
appuyé sur son parti, auquel le rattachaient la modération de son
caractère et les origines de sa famille. Mais il entretenait avec le
centre gauche des relations suivies ; et son libéralisme ardent s'ac=