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LE CURE DE DORNHEIM 77 sa femme et ses enfants. Il ne s'en tint pas là : il prêcha en chaire contre le pasteur et sa religion. Thomas Schmidt semble lui en avoir gardé double rancune, et il exagère peut-être, quand il nous raconte que ce coquin de Bornival avait un moyen commode de tranquilliser sa conscience : c'était, dès qu'il éprouvait le moindre scrupule, de se faire donner l'absolution par son moine. Notre pasteur n'était malheureusement pas mieux traité que le clergé protestant. Il eut beaucoup de peine, en 1649, à contenter un prédicateur de l'armée suédoise, Allemand natif de Kitzingen, qui logea dans sa maison avec huit personnes et dix chevaux. La situation des professeurs en Thuringe fut encore plus malheureuse que celle des pasteurs. Comme les écoles a vaient été détruites ou abandonnées, ils ne pouvaient plus exercer leur profession et vivaient dans une misère profonde. Le recteur Otto d'Eisfeld en était réduit à battre le blé comme le dernier des paysans, et le recteur Stechan d'Arnstadt n'osait plus sortir de chez lui, faute de vête- ments. Mais ceux qui souffraient encore le plus de la guerre, c'étaient les paysans. Partout les soldats, fantassins, cava- liers, isolés ou en troupes, simples soldats ou officiers, quelle que fût leur religion, quel que fût leur parti, pil- laient, incendiaient, exerçaient toutes sortes de violences, détruisant tout, même sans profit pour eux, même à leur détriment, brûlant par exemple leurs propres camps par incurie et y périssant quelquefois. Les Suédois, qui prétendaient venir au secours des pro- testants, les tuaient comme des chiens, écrit notre curé. Un paysan fut tué à Dornheim en 1638 pour n'avoir pas