Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
74                 LE CURÉ DE DORNHEIM

« Dieu nous vienne en aide », écrit alors le curé. Il avait
ordonné qu'on l'ensevelît auprès de sa sœur. Les larmes de
tous ses sujets l'accompagnèrent à sa dernière demeure.
   Gunther ne laissait pas d'enfants : il eut pour successeur
l'aîné de ses neveux, Christian de Schwartzbourg. Christian
vint s'établir au château de Neideck à Arnstadt, épousa
Sophie Dorothée de Kranichfeld, fille d'un seigneur des
environs, et tous deux s'efforcèrent de suivre, à l'égard de
leurs sujets, les bons exemples de leur oncle.

   Les pasteurs étaient aussi exposés que leurs paroissiens
aux dangers de la guerre. Ceux du comté de Schwartzbourg
furent plusieurs fois obligés de se réfugier dans la petite
ville fortifiée d'Arnstadt. Ils y laissaient leurs femmes et
leurs enfants et en sortaient pour aller remplir, souvent au
péril de leur vie, les devoirs de leur ministère.
   Le 23 mars 1637, comme il retournait à Arnstadt, le
curé de Dornheim fut fait prisonnier par les cavaliers du
colonel Spurke. Il réussit à s'échapper et rentra dans la
ville. Un autre jour un capitaine de cavalerie, le pistolet au
poing, l'obligeait à lui donner ses bas et ses souliers. « Je
les lui donnai, écrit-il, vu que je préférais ma vie à une
paire de souliers. » Un autre jour encore, il était allé
baptiser l'enfant d'un petit propriétaire, et on était sur le
point de se mettre à table, quand une bande de soldats
survint, mangea le dîner, emmena le parrain et enleva au
curé sa soutane, son manteau et ses bottes. On ne lui lais-
sait que la culotte et le gilet.
   Le clergé, ainsi maltraité, disparaissait peu à peu. A
Durchwing, il n'était plus représenté que par un écolier
qui, un crucifix à la main, accompagnait seul les cercueils
au cimetière en chantant l'office des morts.