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SAINT AVITE. 9 tous retrouver; aussi, pour m'éviter l'embarras, soit de refaire ceux qui s'étaient perdus, soit de classer ceux qui avaient pu échapper a ce naufrage, j'avais cessé de m'en occuper. Mais plus tard j'ai retrouvé chez l'un de mes amis une certaine partie de mes poésies. Le sujet qu'elles trai- tent correspond assez bien au titre ; toutefois, lorsque l'occa- sion s'en est naturellement offerte, elles effleurent d'autres matières. Puisque tu l'exiges, ces oeuvres, bien obscures par elles- mêmes, iront demander a ton nom une illustration qu'elles ne sauraient emprunter au mien. Quelque habile et savant que l'on soit, lorsqu'on aborde un sujet religieux, l'on ne peut se croire apte à ce genre de poésie, si l'on ne sait pas s'astreindre aux règles de la foi, tout aussi bien qu'a celles de l'art des vers. Dans une matière aussi grave, l'on doit en effet renoncer a toutes les licences de la fiction , permises ailleurs, aussi bien aux poètes qu'aux peintres. Dans les poèmes profanes, au contraire, plus un auteur se montre, je ne dirai pas 'élégant, mais téméraire dans l'art de mêler la fable avec la vérité, plus il fait admirer son génie. Je ne parle point de ces expressions et de ces mots que nous ne devons pas même relever dans les- œuvres d'autrui, bien loin de songer a les introduire dans les nôtres, et qui cependant, laissant entrevoir une chose sous une autre, donnent de si grands avantages aux poètes, et tant de charmes a leur composition. Aux yeux des gens du monde, qui ne manqueront pas d'imputer, soit à une certaine non- chalance, soit a notre impéritie, ce dédain calculé des li- cences poétiques, nous allons sans nul doute passer pour avoir entrepris une œuvre plus ardue qu'utile. Mais nous redoutons bien plus la censure de Dieu que nous ne sommes jaloux des applaudissements des hommes. Si une critique nous est réservée, soit à raison de notre manière d'exposer