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360 CHRONIQUE LOCALE. « UN CENSEUR. Tout homme a ses travers, tout métal a sa cangue, Mais ce qu'on vous reproche est un excès de langue. L'AUTEUR. Vos amis voudraient bien m'en couper un morceau Pour cacher la clarté qu'on tient sous le boisseau. » Branle-Bas, p. 126. Qu'est ce que c'est que ce morceau de langue avec lequel on doit cacher une clarté qui est déjà sous un boisseau? Si le bois- seau est en bon état il suffit à lui seul pour voiler la clarté, sans qu'il soit besoin de la langue du poète. Nous avons raillé M. Bastide en prose, mais il a encadré le nom de M. de Laprade dans des vers, nous ne le quitterons pas sans lui avoir appliqué la peine du talion. RONDEAU. Bastide, aux champs de la Provence, Rappelle au cœur un site heureux, Un humble toit où l'on est deux, Où l'on vieillit, où de l'enfance On suit les premiers pas, les jeux. Et là -bas, sur les flots si bleus, Dans une barque qui s'avance, Des amis s'écriant joyeux : Bastide ! Mais sous notre ciel nuageux A ce nom gardez le silence. Il rappelle un talent honteux, Un esprit né pour la vengeance ; C'est un poète au cœur haineux Bastide ! En publiant un volume de satires violentes sous le titre de Branle-has, M. Bastide a voulu se comparer à ces écumeurs de mer qui sont la terreur des océans. Le pirate ne crée pas, il dé- truit ; il n'enrichit pas la patrie, l'effroi qu'il inspire détourne les navires marchands de fréquenter de fertiles rivages. Cependant il se fait un nom comme un grand capitaine, il s'enrichit autant et plus qu'un armateur; on le craint, on le ménage, au besoin on traite avec lui, mais cette existence n'est pas sans danger. Que le forban rencontre un jour un brave brick armé en guerre et il se fait bientôt une de ces exécutions qui, en purgeant les mers, vengent la justice et l'humanité. A. V. Aimé VINGTRINIER, directeur-gérant.