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224 DES AFFINITÉS DE LA POÉSIE accepté de tous, du pauvre aussi bien que du riche. Est-ce à dire cependant que les témoignages en faveur du travail manquent dans l'antiquité? Loin de la , plus on remonte vers les époques primitives, plus ils abondent et plus ils sont explicites. Aux temps héroïques, le préjugé existe a peine ; il n'y en a pas trace dans Homère : le poète nomme indistinctement avec le même honneur le devin, le médecin, le chantre inspiré des dieux, le pilote, l'architecte, le forgeron, l'ouvrier qui a doré l'extrémité de l'arc de Pandarus et celui qui a marié l'ivoire a l'argent dans le siège de Pénélope. Hésiode, a son tour, met en précepte ce qu'Homère a mis en action : « Sois ami du travail, dit-il 5a son frère Perses; le « fainéant s'attire Findignation des Dieux et des hommes ; « la paresse n'a des droits qu'à la haine. Si tu travailles, le « désœuvré enviera ton bonheur ; la vertu et la gloire se « joindront à tes richesses, tu seras semblable " un dieu. » a Les législateurs vont plus loin ; ils ne se contentent pas de recommander le travail, ils l'imposent. L'oisiveté était notée d'infamie par les lois deDracon, en d'autres termes , punie de mort. Solon, le réformateur populaire, se contenta de déférer à l'Aréopage le soin de la réprimer ; la tribune politique fut fermée aux dissipateurs , et l'enfant a qui son père avait négligé de faire apprendre un métier, dispensé de l'obligation de le nourrir. Peines perdues ! Les mœurs furent plus fortes que les lois. Au contact de l'esclavage qui avait envahi la société tout en- tière, la notion du travail libre se dégrada; et, de même qu'en présence de l'Olympe antique, peuplé de dieux qui, à force de ressembler à l'homme avaient fini par lui faire honte, Platon avait été amené à développer le majestueux ensemble de ses doctrines spiritualistes, préface de la théodicée chré- tienne, de même , par une réaction analogue, mais injuste cette fois , à l'aspect de l'esclave plongé dans l'enfer du la-