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BIBLIOGRAPHIE. 71
Ce goût pour les lettres le lia, en 1765, avec la marquise
du Deffant qui , malgré sa cécité et ses soixante-dix ans, se
prit pour lui d'une amitié comparable à l'amour le plus violent.
Il avait de son talent épistolaire une haute opinion que les éloges
de Voltaire, de Madame du Deffant et quelques autres personnes
de la cour n'avaient pas peu contribué à augmenter encore. Il
demanda à Madame du Deffant les lettres qu'il lui avait adres-
sées , et conserva soigneusement les copies de celles qu'il avait
écrites soit au général Conway, soit à d'autres personnes, afin de
les livrer un jour à l'impression. Cette correspondance a été pu-
bliée après la mort de Walpole, celles à Georges Montaigu,
en 1818, celles au comte d'Herford, en 1825, celles avec Horace
Mann, ministre d'Angleterre à Florence, en 1832. M. Pierre
Cunningham les a toutes réunies dans leur ordre chronologique»
en 1886.
Walter Scott les trouvait les meilleures de la langue anglaise.
Nous choisirons, parmi les premières du recueil, trois lettres
adressées par Walpole , pendant son voyage en France , à sir
Richard West (1). Elles renferment des peintures de mœurs de
notre pays qui tirent un vif intérêt du caractère étranger de
l'auteur.
PARIS. — LES DIVERTISSEMENTS. - L E S FUNÉRAILLES DU DUC DE
TRESME.
A Richard West Esq.
Paris , 21 avril 17S9.
Cher W e s t ,
Vous nous croyez au sein des plaisirs , il n'en est rien ; les
jeux et les festins sont si multipliés qu'ils absorbent tout le reste.
On va à l'Opéra trois fois par semaine ; mais pour moi ce
serait une plus dure pénitence que de faire maigre ; leur musique
ressemble à de l'harmonie comme une tarte aux groseilles. Ce-
pendant nous n'avons pas encore entendu les Italiens ; on n'y
va guère. Leur plus grand amusement est la comédie ; trois ou
(1) Richard West Esq. , fils unique de Richard West, lord chancelier
d'Irlande.