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LETTRES DE F. OZANAM. 251 solitude immense, an grand malaise. Séparé de ceux que j'aimais, je ne puis prendre racine dans ce sol étranger ; je sens chez moi je ne sais quoi d'enfantin, qui a besoin de vivre au foyer domestique, à l'ombre du père et de la mère ; quelque chose d'une indicible délicatesse qui se flétrit à l'air de la capitale. — El Paris me déplaît parce qu'il n'y a point de vie, point de foi, point d'amour; c'est comme un vaste cadavre auquel je me sens attaché tout jeune et tout vivant, et dont la froideur me glace et dont la corruption me tue. C'est vraiment au milieu de ce désert moral que l'on comprend bien, et que l'on répète avec amour ces cris du Prophète : Habitavi cum habitantibus Cedar, Multum incola fuit anima mea ! Si oblitus fuero tui, Jérusalem, Adhasreat lingua mea faucibus meis ! Ces accents de poésie éternelle retentissent souvent dans mon âme et pour moi, cette ville sans bornes où je me trouve perdu, c'est Cédar, c'est Babylone, c'est le lieu d'exil et de pèlerinage ; et Sion, c'est ma ville natale avec ceux que j'y ai laissés, avec la provinciale bonhomie, avec la charité de ses habitants, avec ses autels debout et ses croyances respectées. La science et le catholicisme, voilà mes seules consolations, et certes, cette part est belle. Mais là encore, espérances déçues, obstacles à surmonter, difficultés à vaincre ! Tu n'ignores pas combien je désirais m'enlourer de jeunes hommes sentant, pensant comme moi ; or je sais qu'il y en a, qu'il y en a beaucoup ; mais ils sont dispersés comme l'or sur le fumier, et difficile est la tâche de celui qui veut réunir des défenseurs autour d'un drapeau. Et puis, quand on veut porter les mains à l'arbre de la science, que d'épines en défendent l'accès ! Les bibliothèques sont éloignées, et l'on n'y obtient point aisément les livres,