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                         DE LA NATUKE.                        107
de tous les faits moraux , l'expression de toutes les manières
d'être de l'âme humaine.
    De ces rapports mystérieux de notre âme avec l'univers visible
 et de tous deux avec Dieu , dérivent tous les grands principes où
 s'alimente la poésie , autant comme ordre d'idées que comme
 mode particulier d'expression.
    Quel homme ne l'a pas appris de ses propres émotions ? Il y a
 dans la nature quelque chose qui répond à toutes les situations
 de notre âme, aux phases les plus diverses de nos passions,
aux ligures les plus insaisissables de nos rêves ; il y a des cou-
leurs pour servir de parure à toutes nos joies ; il y a des bruits
gémissants pour faire écho à toutes nos douleurs ; il y a des pro-
messes infinies pour nourrir toutes nos espérances.
    Mais ce qui fait surtout la grandeur poétique de la nature, ce
 qui la rend instructive et sacrée autant qu'elle nous est douce ,
c'est qu'en nous parlant de notre propre cœur elle nous parle de
Dieu avec les mêmes mots ; c'est qu'il n'est pas entre ses moin-
dres tableaux une seule figure de nos sentiments et de nos pen-
sées qui, malgré l'infinité de la distance, ne se rattache aussi à
une des innombrables pensées qui se déroulent dans le sein de
l'Eternel. Sitôt qu'une voix des forêts ou des fontaines nous a
fait entendre quelques notes des mélodies de la terre , nous
sentons murmurer en nous une voix qui nous révèle l'universelle
harmonie. Sitôt qu'un sourire de l'invisible nous luit dans la
sérénité du ciel , un regard plein d'amour s'ouvre dans notre
cœur pour sourire aux hommes, à la nature et à Dieu.
    Le monde physique est donc entre Dieu et l'humanité un su-
blime intermédiaire participant des deux mondes qu'il sépare ;
il porte à la fois dans chacun de ses traits la ressemblance de
l'être pour lequel il fut créé et la ressemblance du Créateur. La
nature est un milieu transparent qui reflète à la fois les deux ho-
rizons opposés. Elle est comme un de ces miroirs liquides, comme
un de ces beaux lacs des montagnes où l'homme en s'inclinant
voit le ciel se peindre avec tous ses nuages et toutes ses étoiles,
sans cesser d'apercevoir au fond la terre, avec les plantes ver-
doyant et les caillous variés ; là , par un gracieux enchantement,