Images d'une Nonagénaire

Créée en 1916, la Foire internationale de Lyon a suscité affiches, photographies, cartes postales, timbres-poste et autres.

Ce n'est pas un, ce sont trois lions, évidemment « superbes et généreux », qui trônent, chacun sur une affiche des années 1920, annonçant la Foire internationale de Lyon, alors toute nouvelle, aujourd'hui devenue une institution qui célèbre en 2006 son nonantième anniversaire. Ce sont trois des affiches récemment acquises par la Bibliothèque, en vue d'augmenter sa collection en la matière [note]Voir page 45. Cela méritait bien une promenade à travers les éditions successives de cette manifestation d'ordre économique qui en appela volontiers à l'image... pour imposer la sienne.

Affiche de la Foire de Lyon, par H. Pabot, Paris, Cornille & Serre Imprimeurs, 1920 (BM Lyon, s.c.).

Force est de l'avouer : c'est dans la tête d'un citoyen helvétique, que naquit d'abord, vers 1914, l'idée de créer une foire à Lyon : Georges-Louis Arlaud [note]Issu d'une ancienne famille d'origine française qui s'était fixée en Suisse trois siècles auparavant, Georges-Louis Arlaud (1869-1944) avait longtemps hésité entre le théâtre et la photographie, avant de s'installer à Lyon, successeur de la maison Bellingard, place Meissonier., jeune photographe établi dans la ville et vite devenu un portraitiste à la mode. Son idée séduisit deux hommes d'affaires lyonnais, M. Guichard, président de la Ligue de Défense des Intérêts économiques et M. Rivoire, président du Syndicat d'Initiatives, lesquels s'entremirent auprès des pouvoirs publics et économiques, afin de démontrer la portée et la viabilité d'une « Foire d'échantillons ».

Lyon et Leipzig face à face

Affiche de la Foire de Lyon, 3-16 mars 1924 Lyon, Cohendet Frères (BM Lyon, s.c.).

Des foires ont jadis existé à Lyon et, ce, dès le début du XVe siècle, dans un Moyen-Age finissant déjà aéré par le grand souffle de la Renaissance [note] Voir Marc Brésard, Les Foires de Lyon aux XVe et XVIe siècles, Paris, Picard, 1914 (BM Lyon, K 137280) ; Mathieu Varille, Les Foires de Lyon avant la Révolution, Lyon, Impr. Bonnaviat, 1920 (BM Lyon, 450889).. Les marchés régionaux réputés de Valence, de Tournon, de Pézenas, plus encore les fameuses foires de Champagne et de Brie, pour ne pas parler de celle de Beaucaire, la grande ancêtre dont la création remontait à 1217, maintenaient les échanges commerciaux et attiraient les foules. La bourgeoisie marchande lyonnaise voulait la sienne, à l'égal de celles de Genève, de Francfort et de Leipzig : en pleine guerre de Cent Ans, on intervint auprès du dauphin Charles, régent du Royaume, avant de devenir le roi Charles VII. Par sa « Lettre de Vienne » datée du 9 février 1420, celui-ci accorda à la cité l'autorisation de tenir chaque année deux foires franches, c'est-à-dire exemptes de tout impôt, ouvertes aux marchands de toutes nationalités, admettant les monnaies de tous les pays, forains et marchandises bénéficiant de la protection des soldats du roi. La première s'ouvrait le quatrième lundi après Pâques et se tenait sur la rive droite de la Saône ; la seconde commençait le 15 novembre, à la Saint-Martin et avait lieu sur la rive gauche. Chacune durait dix jours.

Affiche de la Foire de Lyon, par P. Janin Grenoble, Imprimerie Générale, ca. 1925 (BM Lyon, s.c.).

Devant le succès rencontré, l'assainissement du contexte politique et le développement de la cité désormais toute entière vouée à la banque, à la soie et à l'imprimerie, Charles VII instituait une troisième foire annuelle en février 1444, par sa « Lettre d'Angers ».

D'une durée désormais fixée à trois semaines, les foires lyonnaises s'ouvriraient le mercredi de la semaine de Pâques, le 26 juillet et le 1er novembre. A son tour, le roi Louis XI, fort amis des bourgeois lyonnais, allait en ajouter une quatrième en mars 1463, étendant les privilèges afférents, avant que ne soit créé un tribunal de la Conservation appelé à juger des inévitables litiges entre marchands. Après une interruption provisoire en 1484, un édit royal en rétablissait d'abord deux (1487), puis en revenait à quatre (1489). Malgré cela, la manifestation allait lentement mais sûrement connaître un long déclin dû, pour l'essentiel, aux mesures fiscales et douanières mises en place par le pouvoir royal dès le XVIe siècle, qui supprimaient les privilèges des foires franches.

Carte d'acheteur de la Foire de Lyon délivrée par la Compagnie Générale d'Electricité, Lyon, Cohendet Frères, s.d. (coll.part.).

A la Belle-Epoque, les choses ont évidemment bien changé. Le siècle industriel a suscité les fameuses Expositions universelles nées en 1851 à Londres. Paris répliqua par celle de 1867, d'autres villes suivirent et Lyon y sacrifia par trois fois : en 1872, en 1894 et en 1914, précisément. Retardée par les grèves et les inondations, cette dernière fut inaugurée, avec du retard, le 22 mai, à Gerland ; handicapée par l'état de guerre, elle ferma ses portes le 11 novembre [note]Contrairement à ce que l'on voit encore souvent écrit, la déclaration de guerre n'entraîna pas la fermeture de l'Exposition, mais seulement celle des pavillons des pays belligérants comme l'Allemagne. Par une singulière ironie des dates, la manifestation ferma ses portes le 11 novembre 1914, à cinq heures de l'après-midi. . N'empêche, le succès fut au rendez-vous. C'est bien la cité moderne, que Lyon a voulu symboliser dans son exposition, soulignait son commissaire, le professeur Jules Courmont [note]Professeur à la faculté de Médecine, Jules Courmont (1865-1917) fut à Lyon l'un des promoteurs de l'hygiène urbaine.. L'immense ensemble de bâtiments, conçu par l'architecte Tony Garnier, ne va-t-il pas devenir les gigantesques abattoirs d'une ville en pleine croissance ? Paris à sa foire depuis 1904, Lyon peut-elle rester l'arme économique au pied, face au prestige de la fameuse Foire de Leipzig, fer de lance de la propagande ennemie ?

Carte postale publicitaire pour la foire de Lyon de 1919, dessin de G.A. Wendt , Paris, Edition de l'O.C.I.M., s.d (coll.part.). Cest la Victoire de la france sur l'Allemagne... et celle de la Foire de Lyon sur celle de Leipzig.

Edouard Herriot, jeune et entreprenant maire de Lyon, et Jean Coignet, président de la Chambre de Commerce, se laissent convaincre : dès le 18 décembre 1915 est constituée la Société lyonnaise pour le Développement du Commerce et de l'Industrie qui va devenir, plus simplement, en mai 1916, la « Société de la Foire de Lyon » puis, en octobre 1927, la « Société de la Foire internationale de Lyon ». Elle émet 5 000 actions de 500 francs dont les porteurs ont à choisir les douze administrateurs. Son siège, démarche significative, est fixé à l'hôtel de ville de Lyon. Il est vrai qu'Edouard Herriot est président d'honneur à côté du président en exercice, Achille Lignon [note]Négociant en vins et spiritueux, Achille Lignon (1854-1936) présida plusieurs fois le Tribunal de commerce et fut président de la Chambre de Commerce de Lyon.. Son objectif principal et affirmé est de « promouvoir le développement du commerce et de l'industrie française principalement par la création d'une Foire d'échantillons à Lyon et par toutes autres entreprises tendant aux mêmes fins ». Le maire Herriot utilise une formule plus triviale et typiquement lyonnaise, pour qui il est question de faire « le maximum d'affaires sur le minimum d'espace, dans le minimum de temps, avec le minimum de frais ». Finalement, le conseil d'administration fixe la tenue de la première Foire d'échantillons au 1er mars 1916, pour une durée de quinze jours. Il se fait épauler, quant à la « propagande », par un Comité de la Foire, lui aussi présidé par l'omniprésent maire et qui sera transformé en association déclarée le 4 juin 1921 et reconnue d'utilité publique par décret du 10 septembre suivant.

Encore faut-il trouver des lieux adéquats. Les divers bâtiments municipaux mobilisés, comme le palais du Commerce, le palais de Bondy et le palais de la Mutualité sont vite jugés trop exigus et il faut aussi investir l'ager publicus lyonnais : on couvrira plusieurs quais du Rhône de petits stands en bois, bien modestes, où les produits seront présentés par sections. Du quai d'Herbouville au quai de Retz [note]Actuel quai Jean-Moulin depuis 1946., jusqu'à la passerelle du Collège, sur la rive droite ; de la place d'Helvétie au pont Morand sur la rive gauche, place Morand comprise. Soit sur une longueur frôlant les 2,5 kilomètres. Malgré les difficultés liées à la guerre, les industriels français et étrangers sont largement présents et la manifestation peut s'ouvrir à la date prévue. Ils sont 1 342 exposants, dont 143 étrangers parmi lesquels 77 Suisses, 43 Italiens et 14 Britanniques.

Carte postale illustrée pour la foire d'échantillons de 1916, dessin par Jean Robert s.d. (coll.part.).

Un bâtiment au caractère exceptionnel

C'est donc un joli succès barré de tricolore, qui fait taire l'ironie des Allemands et précède la naissance de plusieurs manifestations semblables en Europe, telle la foire de Bâle, celles de Milan, de Prague, de Bruxelles... La presse locale se répend en commentaires flatteurs. Le jour même de l'inauguration, Le Salut Public, journal du soir lié aux milieux d'affaires, s'empresse d'écrire : La journée d'inauguration de la Foire de Lyon est favorisée par un temps admirable. L'animation est très grande. Une foule considérable est venue de toute la région et de l'étranger. On remarque la présence de nombreux Italiens, Anglais, Suisses et Espagnols. Malgré les difficultés de la production industrielle, on espère qu'il se traitera de nombreuses et importantes affaires. [note]Le Salut Public du 1er mars 1916 (BM Lyon, 950001). De son côté, la Revue des Deux Mondes parle d'une offensive économique [note]Revue des Deux Mondes, numéro du 15 avril 1916 (BM Lyon, 950139)..

Photographie des visiteurs et badauds à la foire d'échantillon de 1916, place Bellecour (coll.part.).

Le succès se confirme avec la Foire de 1917 et ses 2 169 exposants, avec la visite du président de la République Raymond Poincaré et avec la décision de construire un palais afin d'abriter la manifestation. Pour une fois les Lyonnais voient grand, et les organisateurs jettent leur dévolu sur un vaste espace de 105 000 m2 appartenant à la Ville et qui s'étend au nord de la cité, entre le Rhône et le parc de la Tête-d'Or. La construction en est confiée à Charles Meysson, architecte de la Ville [note]Outre le Palais de la Foire, sottement jeté à bas pour sa plus grande partie, à la fin du siècle dernier, Charles Meysson (1869-1947) construisit à Lyon, de par ses fonctions officielles, les grilles du parc de la Tête-d'Or, la mairie du VIIe arrondissement, la Bourse du Travail et les kiosques à fleurs qui existent toujours place Bellecour et place Lyautey.. Le 5 mars 1918, lors de la troisième édition de la Foire, le maire Herriot lance officiellement les travaux en plantant le premier pilotis du futur palais. Meysson a conçu un immense bâtiment en arc de cercle, évolutif... en fonction des budgets successifs où, in fine, vingt-quatre bâtiments de quatre étages - les travaux vont traîner jusqu'en 1926 et le nombre total de bâtiments prévus jamais construit - seront disposés le long d'une rue couverte centrale, le tout reposant sur des pilotis, en ce lieu volontiers inondable. S'il fallait décrire, de façon objective, les éléments qui donnent à ce bâtiment son caractère exceptionnel, on pourrait en retenir quatre : les très grandes qualités plastiques de son espace intérieur, la modernité de sa conception à modules, l'originalité de fabrication de son décor extérieur appliqué à une construction quasi industrielle, et enfin la technique alors d'avant-garde que constitue l'emploi de piliers en béton, note l'historienne Anne-Sophie Clémençon [note]Anne-Sophie Clémençon, « Charles Meysson architecte lyonnais ou la mémoire d'une ville », dans Le Mot Dit n° 5, octobre 1989, Lyon, Chomarat, 1989 (BM Lyon, 954183)..

En attendant, il faut multiplier les lieux d'accueil, comme le lycée Ampère, afin de pouvoir héberger les 3 175 exposants de l'édition 1918, parmi lesquels un fort contingent d'étrangers.

Première Foire de la paix retrouvée, celle de 1919, ouverte le 1er mars, doit abriter 4 700 exposants dont pas moins de 1 500 étrangers. Un certain nombre peut être installé dans la partie déjà construite du Palais. Le développement progressif de la manifestation lyonnaise devait conduire la Société de la Foire à réaliser au cours des années, des constructions et des aménagements de terrains sur l'ensemble des 243 000 m2 de son domaine, loué jusqu'en 2017 par la convention entre la Foire et la Ville de Lyon qui, depuis l'origine de la Société, a consenti des prêts importants pour la réalisation des ensembles immobiliers, signale la plaquette du Cinquantenaire [note]Anonyme, La Foire internationale de Lyon : 50 ans au service de l'Industrie et du Commerce, Lyon, Chourgnoz Publicité, s.d.. Vont ainsi s'élever dans les environs du Grand Palais, le hall de l'Alimentation de 13 200m2 (1934), le hall de la Mécanique (1937, agrandi en 1951, soit d'un total de 14 300 m2), plus tard les halls 25 (1948), 27 (1953) et 26 (1954).

Lyon. Revue d'expansion commerciale. Organe officiel de la Foire de Lyon, n°16, octobre 1921 (coll.part.).

Rançon du succès : il devient de plus en plus difficile d'héberger tous les participants, qu'il convient également de distraire et de nourrir convenablement. L'affluence des visiteurs, accourus du monde entier, pose un grave problème de logement. Les organisateurs décident aussitôt la construction d'un imposant hôtel de 400 chambres, face à la gare des Brotteaux. Il est décidé, en même temps, de tenir désormais deux foires : une foire de printemps au début de mars, et une foire d'automne au début d'octobre. La foire de printemps devait réunir les industries tributaires de la mode : textiles, vêtements, bijouterie, horlogerie, chaussures, maroquinerie, céramique, parfumerie, bimbeloterie, papeterie, imprimerie, photographie, automobiles. A la foire d'automne étaient réservés : la construction industrielle, le bâtiment, la chimie, l'alimentation, les produits coloniaux. [note]Richard Levin, Commerce et Industrie à la Foire de Lyon, Bissuel, s.d. En fait, la règle ne sera pas respectée à la lettre.

La Foire possède sa revue

Inaugurée le 7 mars par pas moins de trois ministres, MM. Marsal, Sarrault et Issac [note]Industriel lyonnais un temps président de la Chambre de Commerce, Auguste Isaac (1849-1938) fut ministre du Commerce et de l'Industrie de janvier 1920 à janvier 1921., la Foire du printemps 1920 marque un nouveau démarrage. Elle offre à ses exposants des stands en béton armé en face des stands en bois, sur l'avenue du Parc [note]Avenue de Grande-Bretagne depuis 1947. ; la place Bellecour accueille l'automobile et le matériel agricole associés à la joaillerie et à la parfumerie ; le cours du Midi, devenu le cours de Verdun, et la place Carnot reçoivent la confection, la fourrure, la céramique et l'alimentation ; le palais de la Mutualité abrite la bijouterie, alors que construction industrielle, bâtiment, chimie et chauffage cohabitent sur les quais et sur la place Morand. La Foire d'automne, qui a réussi à attirer plus d'un millier d'exposants, n'est pas en reste avec 75 stands dévolus aux machines agricoles, 80 à la mécanique et à la métallurgie, 100 aux produits alimentaires. Parmi les 13 pays étrangers, on remarque les Etats-Unis, la Chine et le Brésil. L'inauguration, le 3 octobre 1920, mobilise elle aussi trois excellences, provoque pas moins de six discours célébrant le relèvement du pays, précède un banquet de 800 couverts, donné dans le nouveau palais dont la presse se plaît à souligner la grandeur. Le palais de la Foire sera certainement l'oeuvre architecturale durable la plus grandiose qui ait été construite en France, depuis des années, note Victor Cambon dans Démocratie Nouvelle. Il est vrai que les organisateurs ont bien fait les choses : les invités enchaînent soirée de gala au Guignol du Gymnase [note]Aujourd'hui le théâtre des Ateliers, mais on y entrait alors par le quai Saint-Antoine., descente du Rhône sur... le « Ville de Lyon », voyage sur la Côte-d'Azur, excursions aux lacs d'Annecy et de Genève, promenades en avion au-dessus des Alpes et des Monts du Lyonnais... Désormais, la Foire possède même son « organe officiel », sous forme d'une « revue mensuelle d'expansion économique commerciale » lancée en juillet 1920 et tout simplement titrée : Lyon. Annonçant l'édition de 1921, elle ne craint pas les formules-chocs comme Les frais de participation à la Foire de Lyon sont inférieurs au coût d'une page d'annonces dans un grand périodique.

Timbre de la Foire de Lyon

L'édition du printemps 1921 est marquée par la participation nouvelle de la Roumanie et la session d'automne par l'institution d'un Concours international d'Inventions. A celle de l'automne 1924, ce ne sont pas moins de sept excellences qui se sont déplacées... Il est vrai que le maire Herriot est alors Président du Conseil et le Lyonnais Justin Godart, ministre du Travail. L'exposition d'horticulture séduit ; le stand de la Ferme modèle étonne, avec son écrémeuse, sa baratte, son malaxeur, qui tous fonctionnent à l'électricité. En mars 1925, on remarque le stand de l'URSS ; en novembre on se mobilise autour de la Semaine du lait au cours de laquelle Edouard Herriot visite la club de la Chèvre [sic] et pose devant les photographes en compagnie du directeur de l'Ecole vétérinaire de Lyon, le professeur Porcher. En mars 1926, dans le palais considéré comme achevé, le grand hall abrite désormais les automobiles. En mars 1927, une délégation allemande rend aux organisateurs la visite que ceux-ci firent, l'année précédente, à la Foire de Leipzig. Les stands de construction d'appareils et d'accessoires de T.S.F. attirent les curieux. Beaucoup exposent des récepteurs de grand luxe, dont la présentation a été conçue et exécutée dans le but de satisfaire aux exigences féminines. Désormais, ils pourront trouver place dans les plus riches intérieurs, sans les déparer. [note]La Vie Lyonnaise du 19 mars 1927 (BM Lyon, 950559). A la cession d'automne, avant tout agricole et horticole, le jardin moderne conçu par MM. Rivoire et fils séduit les visiteurs.

"La Foire de 1931", Guignol, n° 858, 14 mars 1931 (BM Lyon, 950633).

Suivi par Guignol, Gnafron et leurs amis, Edouard erriot visite la Foire en compagnie de son adjoint et féal, Octave Biron, dont la physionomie épanouie fait la joie des caricaturistes.

La Foire de 1929, visitée le 10 mars par Fernand Buisson, Président de la Chambre des députés, en compagnie de l'incontournable Edouard Herriot, accorde une place nouvelle, importante et durable à l'automobile. Talbot, Delage, Fiat, Ford, Bugatti, Chrysler et bien d'autres sont là ; tout comme les motocyclettes Monet et Goyon dont il est superflu de vanter les qualités de technique et de présentation. [note]Idem, numéro du 16 mars 1929. Sans parler de la voiture « semi-rigide » [sic] du constructeur lyonnais Declerieux. De son côté, la démonstration de téléphone automatique installé par la Société des téléphones Grammont fait grande impression. En mai 1930, après la cession de printemps et devant le nombre croissant des exposants, la presse annonce le projet du jour, concocté par l'ingénieur en chef de la Ville, Chalumeau : l'édification d'une immense coupole sur la partie centrale du palais de la Foire, ce qui doterait notre ville d'une gigantesque salle de réunion où pourraient se dérouler de multiples manifestations : expositions, banquets, kermesses, congrès hippiques [sic], matches de boxe, etc. [note]Idem, numéro du 24 mai 1930. Un projet qui n'aura pas de suite.

Couverture de Commerce et Industrie à la Foire de Lyon, Pierre Bissuel, mai 1947 (coll.part.).

Sur la piste de ski

Si l'édition du printemps 1931 doit compter avec d'importantes inondations qui transforment le parking longeant désormais le Rhône en stand aquatique et lacustre, celle de 1934 prend des allures d'évènement. La cession de printemps est toute imprégnée des nombreuses manifestations célébrant le centenaire de la mort de Jacquard, avec exposition au Grand Palais, inauguration de la nouvelle Ecole de tissage édifiée par Tony Garnier, cours des Chartreux [note]Aujourd'hui cours Général-Giraud, depuis 1949., bal de la Soie à la Préfecture et visite à Oullins, sur la tombe de l'inventeur. Sans oublier les désormais traditionnelles revues de la Foire, que propose chaque année les deux grands music-halls lyonnais, le Casino Kursaal [note]Aujourd'hui le cinéma UGC-Pathé, 79 rue de la République. et l'Horloge [note]Aujourd'hui détruit, l'établissement, réputé pour ses spectacles polissons, était situé 145 cours Lafayette., ce dernier achevant la soirée avec une opérette en trois actes, Une soirée chez les nudistes.

"Les Sports d'hiver à la foire de Lyon : les essais de la piste de ski", couverture de La Vie Lyonnaise, n°727, 15 septembre 1934 (BM Lyon, 950559).

La cession d'automne crée l'évènement, l'installation dans la galerie du Grand Palais d'une piste de ski que la presse décrit en termes lyriques : Au point de vue construction, cette piste de ski donnera toutes les garanties de sécurité ; au point de vue dimensions et technique du ski proprement dite, elle pourra rivaliser avec les meilleurs champs de neige. Entourée de sapins, elle donnera l'illusion qu'une pente des Alpes hivernales a été amenée au palais de la Foire par quelque génie bienveillant de la montagne. [note]La Vie Lyonnaise du 8 septembre 1934. Une foule énorme se précipite vers la fameuse piste, pour regarder ou pour pratiquer, car des cours de ski sont donnés par des professeurs diplômés tous les matins, une matinée enfantine attire les chères têtes blondes et une soirée de gala permet d'admirer descentes, sauts et évolutions effectués par les moniteurs du 199e régiment d'infanterie de Briançon et par des skieurs comme Frison-Roche, Tournier, Stang et l'acrobatique Hartung. Après quoi la soirée s'achève par le concours de la plus belle skieuse.

Le maréchal Pétain et l'amiral Darlan inaugurant la foire commerciale de Lyon, Radio nationale, 5 au 11 octobre 1941 (coll.part.).

On note la présence du stand de presse parisienne repliée à Lyon, de lui de la Suisse, dans un décor agreste et de celui de l'Allemagne tendu de rouge avec le portrait du chancelier Hitler entre deux croix gammées.

Devant le succès remporté, les organisateurs renouvellent l'expérience trois ans de suite, mais, à l'automne 1938, la piste a disparu d'une Foire qui s'ouvre avec plusieurs jours de retard consécutifs à la grave crise internationale qui vient de se régler, provisoirement, à Munich. Le conflit qui éclate l'année suivante interrompt l'essor de la manifestation dont les bâtiments sont réquisitionnés par l'autorité militaire. En 1940 peut encore se tenir la cession d'avril, inaugurée par les ministres Raoul Dautry et André Frossart, consacrant une exposition au rôle de la Femme au service de la Patrie et une autre à la Marine française, que visite le cardinal Gerlier, archevêque de Lyon. Toutefois, dès le mois de mai, les bâtiments abritent les nombreux réfugiés jetés sur les routes par l'Exode. Les Foires de 1941 et 1942 ne peuvent se tenir qu'en septembre, au milieu des difficultés de toutes sortes, mais sous le portrait officiel du maréchal Pétain, lequel effectue même une visite officielle à la seconde, en compagnie de l'amiral Darlan. Puis la zone libre est envahie et les locaux sont une nouvelle fois réquisitionnés. Par les Allemands d'abord, par les troupes franco-américaines à la Libération. Exit la Foire en 1943, 1944 et 1945.

Inauguration de la foire de Lyon de 1966 par Georges Pompidou, Premier ministre dans La Foire internationale de Lyon : 50 ans au service de l'Industrie et du Commerce Lyon, Lescuyer, s.d. (coll.part.).

Il va falloir réaliser les réparations indispensables, en particulier au hall de la Mécanique où les vitres ont été pulvérisées par l'explosion des ponts, afin que la manifestation renaisse le 27 avril 1946, dans le cadre de la nouvelle réglementation en la matière promulguée par le Gouvernement provisoire, en septembre de l'année précédente.

La Foire repart. 3 000 exposants, français et étrangers, occupent bientôt les divers espaces. A l'occasion de celle de 1952, le Président du Conseil Antoine Pinay inaugure le tunnel de la Croix-Rousse et le nouveau pont Poincaré, avant de visiter l'exposition de la soierie. Après qu'un pavillon d'accueil de la Foire ai été installé devant la gare de Perrache [note]Ce bâtiment existe encore, abandonné et décrépi, au Nord-Est de la gare. Mais pour combien de temps ?, un nouveau bâtiment est ajouté sur ce qui est devenu le quai Achille-Lignon : le palais des Congrès internationaux édifié par les architectes René et Marcel Salagnac. 4 600 m2 de surface. Les Foires se suivent, les Officiels inaugurent, désormais sans Edouard Herriot, qui est mort en 1957, quelques jours avant l'ouverture de la Foire, mais en présence de son pugnace successeur Louis Pradel. Le 24 mars 1968, l'inauguration de la cinquantième Foire par le général de Gaulle est l'occasion d'un discours fameux sur la réforme régionale, au cours duquel le président de la République expose les raisons de la politique de développement des régions, qui doit être celle de la France et doit contribuer à la coopération européenne.

Le maelström de Mai 1968 passé, la Foire continue sa route sur ses 116 700 m2 de surfaces bâties et ses 73 000 m2 de surfaces découvertes. Mais le site ne semble plus répondre aux besoins du moment, alors que le problème des parkings est devenu un véritable casse-tête qui oblige à garer les indispensables et polluants véhicules... dans les allées de l'infortuné parc de la Tête-d'Or. Après soixante-dix ans de bons et loyaux services, la Foire internationale de Lyon émigre hors les murs et s'installe à Chassieux, dans l'Est lyonnais. Le 16 mars 1985, elle ouvre à Eurexpo. Une page est tournée. Une nouvelle histoire commence.