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10               LE TESTAMENT D'UN LYONNAIS




                                 VIII

   Parmi les oeuvres pies alors usitées, une des plus fré-
quentes était celle du rachat des prisonniers. L'usage s'en
perdit à la Révolution, et lorsque fut abolie la contrainte
par corps, il y avait longtemps que les habitants de Clichy
ou de la prison de Roanne n'avaient plus à compter sur
cette chance de délivrance. Mais au xvue siècle, cette œu-
vre, qui nous semble aujourd'hui assez singulière, était de
tradition constante. Dans le testament de « Demoyselle
Gabrielle Du Four, veufue et héritière de noble Guillaume
Charrier, sr. de la Rochette et de Montceindre, » en date
du 19 juin 1666, se trouve un legs de deux cents livres
pour être employées à délivrer « quelques pauures prison-
niers debtenuz pour dettes. » Mornieu ne se borne point à
cette formule concise et entre dans les détails :

  ITEM. Je dorme et lègue à Messieurs les recteurs ou autres ajant
droit de receuoir des pénitents de la Miséricorde, la somme de quatre
cent vingt-cinq liures pour une fois,lesquelles je veus estre employées à
sortir des prisons. Royaux de cette ville dix prisonniers qui soient
pauures y debtenus pour debtes, sans dol ni fraude, lesquelz seront
obligés d'aller faire dire une messe, se confesser et communier à l'in-
tention et rédemption des âmes de mes prédécesseurs quy ont estably
cette deuotion, et laquelle sera continuée à l'advenir pour la somme
de septante-cinq liures pour le rachapt de deux prisonniers le jour du
Jeudy Sainct, touttes fois gens comme dessus a esté remarqué.


   Comme ces prescriptions d'ouir la messe, de commu-
nier, peignent des moeurs éloignées des nôtres ! Le choix
du jour consacré à la délivrance n'était pas non plus dé-
terminé indifféremment. Un usage, qui remontait au
moyen-âge, voulait que cette œuvre fût effectuée pendant
la semaine sainte.