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DE PARIS A LYON ET A AVIGNON. 503 dence d'oublier l'Ă©chĂ©ance d'une lettre de change, et de la laisser pro- tester. Conseillerait-on aussi d'appliquer Ă l'AlgĂ©rie ce genre de nĂ©- goce mĂȘlĂ© de rapines Ă main armĂ©e. Si nos voisins d'Outre-Manche s'en remettent gĂ©nĂ©ralement aux entreprises privĂ©es pour les travaux et les services d'administration, la raison en est, que les fonctions publiques et le sol agricole appar- tiennent exclusivement Ă l'aristocratie nobiliaire. De ce cercle Ă©troit se trouve exclu le reste de la nation. Il est donc dans la politique de cette oligarchie de rĂ©server Ă l'acti- vitĂ© plĂ©bĂ©ienne l'issue industrielle et commerciale ; et cette tradition est, de plus, commandĂ©e par la position insulaire. Mazarin disait du Peuple français : qu'il chante! il payera. En Angleterre, on dit Ă la foule mercantile : qu'elle spĂ©cule et qu'elle obĂ©isse ! La Belgique, oĂč l'on a si bien compris l'heureuse influence de la li- bertĂ© administrative et de la vie locale, a cependant rĂ©servĂ© Ă l'Etat la confection et l'exploitation des chemins de fer ; elle trouve mainte- tenant, dans ses lignes ferrĂ©e9, un revenu qui va toujours grandissant et qui la dĂ©dommage amplement des sacrifices qu'elle s'est imposĂ© dans le principe. Nous voulons copier la race marchande de l'Angleterre, lorsque nos goĂ»ts, nos instincts, nos tendances et nos hahitudes nous Ă©loignent d'elle et de ses pratiques, autant qu'ils nous rapprochent de la Bel- gique qui, un jour, confondra ses destinĂ©es avec celles de la France. D'oĂč viennent donc les prĂ©fĂ©rences de M. Bineau et de la Commis- sion pour les compagnies ? Est-ce parce que l'Etat agit pour le profit de tous, et que les compagnies n'ont d'autre ambition, bien lĂ©gitime certainement, que leurs petits bĂ©nĂ©fices, menus dividendes et primes. Ce que la Compagnie gagne, l'Etat le perd et le public aussi. C'est donc eu un marchĂ© de dupes, ou un marchĂ© de niais. Ainsi, d'aprĂšs les clauses du traitĂ©-Bineau avec la compagnie qui se prĂ©sente pour se substituer Ă l'Etat, on peut Ă©valuer approximative- ment les bĂ©nĂ©fices des concessionnaires. La Compagnie dĂ©boursera, dit-elle, 260 millions, dont l'intĂ©rĂȘt Ă 5 % est de 13 millions garantis par l'Etat. Le revenu du chemin de fer est Ă©valuĂ© Ă 20 millions. Elle doit prĂ©lever, pendant toute la durĂ©e de la concession de quatre-vingt-dix-neuf ans,un intĂ©rĂȘt de 8 p. % sur son capital, soit : 20,800,000 fr., elle aura donc, par an, un bĂ©nĂ©fice de 7 millions 800,000 francs , au-delĂ de l'intĂ©rĂȘt Ă 5 p. % de son fonds social. Ce bĂ©nĂ©fice, rĂ©pĂ©tĂ© sur 7 millions seulement, pendant quatre-