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      Ces pièces, j'ai eu la curiosité de les rechercher dans les archives de
l'Académie ; je les y ai retrouvées presque toutes, en particulier les lettres
du duc de Villeroy, gouverneur de Lyon et protecteur de l'Académie de-
puis 1763, les deux mémoires de Marat (numéros 5 et 6 des manuscrits du
concours), la correspondance échangée par Marat et ses représentants avec le
secrétaire perpétuel La Tourrette, et surtout la lettre autographe et anony-
me de Marat encore munie par bonheur de son cachet de cire armorié qui
l'authentifie et auquel personne jusqu'ici n'avait prêté la moindre attention,
le rapport des commissaires du concours, les procès-verbaux des séances et
autres documents (par exemple la lettre de Dom Gourdin que j'ai citée plus
haut) se rapportant à l'affaire !
     Pour exposer cette « affaire » sous son véritable jour, je n'ai donc, en
quelque sorte, qu'à reproduire ci-après les plus intéressantes de ces pièces,
qui sont pour la plupart inéditesx.
      Dans les premiers jours de mars 1784, l'Académie de Lyon, qui ne s'y
attendait pas le moins du monde, reçut la lettre suivante :
      « A Paris, le 28 février 1784. Messieurs, Je ne puis me refuser aux instances qui me
sont faites par des personnes auxquelles je suis fort attaché, et qui désirent que je vous
engage à proposer, pour le sujet du prix qui doit être décerné en 1785, une question
qui me paroit fort intéressante, et dont personne n'est mieux en état que vous d'appré-
cier l'utilité pour le progrès des arts et des sciences. Depuis que les découvertes de
Newton ont fait changer de face à l'Optique, la construction des lunettes d'astronomie,
de marine et de tous les instruments dioptriques, est fondée sur la théorie de la diffé-
rente réfrangibilité. Cette théorie vient d'être attaquée avec force ; et il importe de savoir si
c'est avec fondement: car tant que l'on ne sera pas éclairé par des principes sûrs, ses pro-
ductions ne peuvent dépendreque d'une routine aveugle, et doivent toujours être imparfaites.
      D'après ces considérations, je vous serai sensiblement obligé, Messieurs, de
vouloir bien proposer pour le prix de physique de 1785, la question suivante : Les
expériences sur lesquelles Newton établit la différente réfrangibilité des rayons hétérogènes
sont-elles décisives ou illusoires t L'examen dans lequel les auteurs entreront doit être
approfondi, et leurs assertions fondées sur des expériences simples, dont les résultats
soient uniformes et constants.
      « Vous ne sauriés, Messieurs, me faire un plus sensible plaisir que de proposer
cette question. J'y prends le plus vif intérêt, et soyés, je vous prie, bien persuadés de
tous les sentiments avec lesquels j'ai l'honneur d'être, Messieurs, votre très humble et
très obéissant serviteur. Le duc de Villeroy ».

    1. Pour les détails complémentaires, se reporter aux Mémoires de l'Académie de Lyon (t, XVIII, 1933).