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                     SOUS LE PREMIER EMPIRE               127

de vous, ce qui me serait impossible. Vous me permettrez
aussi de vous écrire.
  « Il est bien tard. Vous me renverriez si j'étais chez
vous : vous voudriez vous coucher.
  « Dieu vous donne un bon sommeil (19). »

    Ballanche ne fut pas le seul à vouer son âme à Mmc Réca-
mier. — Elle avait à un suprême degré le don de séduction
et elle le garda jusqu'à la fin; — c'était le caractère propre
à son genre de beauté d'attirer les cœurs et de se les rendre
fidèles jusqu'à la mort.
    A Y Abbaye aux Bois, quand ses cheveux auront blanchi,
de ses yeux presque aveugles jaillira encore cet éclat mysté-
rieux qui.subjuguera tout à la fois et la jeunesse d'Ampère
et la vieillesse de Chateaubriand. — Nous pouvons par là
nous faire une idée de l'empire magique qu'elle exerça dans
la fleur de sa vie.
    Camille Jordan et Mathieu de Montmorency, dans le
cercle restreint dont nous tenons à ne pas sortir, ont subi
le joug commun, mais ils l'ont spiritualisé et comme sanc-
tifié. — Ils sont, avec des nuances différentes, comme les
deux voix de l'amitié auprès de cette femme séduisante.
    Camille Jordan est, de tous ceux que nous avons nom-
més, son plus ancien ami, le plus intime au début du
moins. — Mrac Lenormand a tracé de lui un portrait très
vivant (20) :

  « Peu d'hommes ont possédé au même degré que
Camille Jordan, avec les grandes qualités et les vertus


  (19) Souvenirs et correspondance, t. I e r , p. 201.
  (20) M™ Récamier et les amis de sa jeunesse, p. 11.