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486 DU GÉNIE LITTÉRAIRE DE LEUROPE. l'harmonieux idiome de la Provence, en vue de !a Médi- terranée, poétique océan d'Homère, les voies naïves des troubadours, célébrant, sous l'image du printemps, l'aurore de civilisation qui devait illuminer l'Europe. Bientôt les in- génieux trouvères leur répondent des rives de l'Atlantique ; les ménestrels égaient de leurs chants les noirs donjons de l'Angleterre ; les tendres et enthousiastes minnesinger con- tient leurs plaintes aux forêts de l'Allemagne. Une foule d'odes, de romances, de salires, de poèmes chevaleresques et religieux, peintures confuses, mais vives et spontanées de souvenirs personnels ou nationaux, charment les loisirs des grands et du peuple, perfectionnent le langage, étendent les connaissances, préparant ainsi un vaste champ aux futurs interprètes de la pensée. Celte pensée que pouvait-elle être sinon essentiellement catholique, au milieu d'une civilisa- tion dont Rome était le centre et le guide, au milieu des préoccupations d'une croyance austère et saisissante? Aussi fut-ce l'inspiration religieuse qui forma le premier grand poète dont se glorifie l'Europe moderne, colosse placé entre les temps obscurs et les splendeurs d'un nouveau jour, pour résumer toutes les doctrines passées, tous les symboles m a - tériels de la foi, el laisser entrevoir sous leurs voiles les mystères d'un haut spiritualisme. Le Dante parut, el l'Italie, surprise d'un si gigantesque enfantement, trembla elle-même en voyant ses guerriers, ses princes, ses magistrats, ses pa- pes, jugés el condamnés sans retour par l'infaillible ascen- dant du génie: elle crut à la réalité terrible des tableaux déroulés sous ses yeux ; elle se nourrit de cette mâle poésie qui l'appelait à la vertu el à la science; elle comprit son passé, mesura son avenir, et marcha de nouveau à la tôte de l'Europe. Bientôt Pétrarque sur sa lyre mélodieuse excita les ten- dres émotions, tandis que Boccace, le charmant conteur, a i -