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27O                   LE PREMIER AMOUR

 notre homme jouissait dans tout le Vivarais d'une réputa-
 tion de guérisseur comparable à celle des saints les plus
 fĂȘtĂ©s, Ă  laquelle contribuait son dĂ©sintĂ©ressement bien
connu. L'abbé Velay avait en lui une grande confiance,
mais c'est en vain qu'il essaya plusieurs fois de le faire
parler. Mon digne précepteur croyait avoir néanmoins
puisé une foule d'utiles indications dans ses visites fré-
quentes au Tanargue et, avec le supplément de ses propres
observations, il se croyait possesseur de moyens efficaces
pour guérir la plupart des maladies. Les simples qui croissent
sur les cimes jouaient un grand rÎle dans sa pharmacopée,
et je me souviens fort bien que l'arnica, la digitale, la reine
des prés, la valériane, l'airelle myrtille et la grande gentiane
Ă  fleurs jaunes y tenaient le premier rang.
    Par suite de cette disposition d'esprit de mon précepteur,
tout le monde Ă  la maison devait ĂȘtre ferrĂ© sur les spĂ©ci-
fiques végétaux et on lui eût fait beaucoup de peine si l'on
se fût montré sur ce point oublieux de ses leçons. Le digne
abbĂ© s'estimait heureux d'ĂȘtre nĂ© en Vivarais Ă  cause de la
situation privilégiée de ce pays pour l'étude de la botanique.
Il faisait observer qu'on pouvait, en remontant lentement
du Bourg-Saint-Andéol au Mézenc, assister à un printemps
quasi perpétuel, puisque les cerises, qu'on mange parfois dÚs
le commencement de mai dans la région du Bourg et de
Viviers, ne mûrissent qu'au mois d'août au sommet des
Cévennes, et qu'on y recueille des fraises encore plus tard.
Il soutenait que les végétaux étaient, avec [les orages, les
grands purificateurs de l'atmosphĂšre, en faisant, sans qu'on
sache comment, la contrepartie de la respiration des hommes
et des animaux, ce que les savants ont expliqué depuis, en
 disant que les plantes s'assimilent le carbone que nous expi-
 rons et nous livrent l'oxygĂšne qui va revivifier le sang dans