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                        DEUX AMITIÉS                       57

   Pendant les premiers jours qui suivirent son arrivée, elle
ne sortit pas de sa chambre, se trouvant fort souffrante ; la
servante qui l'avait accompagnée, la voyait seule: elle
seule lui portait les tasses d'un lait chaud et savoureux que
fournissait la belle vache suisse d'une ferme, située derrière
l'habitation de M. Werner.
  Cependant, peu après le départ de Mina, Marie avait
recouvré, sinon lagaité, du moins la sérénité. Quelquefois
même on l'entendait chanter, tandis que des fleurs nuan-
cées naissaient sous ses doigts habiles, et c'était beaucoup
pour une jeune poète naturellement portée à un peu de
mélancolie.
    Le jour de sa fête, Madame Desnoyelle trouva dans le
bouquet mouillé encore de rosée que sa diligente fille avait
cueilli dès le matin, un papier où Marie avait tracé, de sa
plus belle écriture, des vers intitulés Y Ange gardien, adres-
sés à sa mère. La bonne Mme Desnoyelle en fut enchantée
et attendrie jusqu'aux larmes. Le soir, il y eut chez elle une
collation où Marie avait invité M. et Mmc Werner et leur
fils. Mme Desnoyelle montra ses vers que son amie jugea si
beaux, qu'elle les lui enleva, assurant que Marie en aurait
bientôt fait une autre copie pour sa mère.
   On parla naturellement de Mme Dermont, la nouvelle
locataire. Le matin même, elle était descendue au jardin et
y avait passé près d'une heure. Mme Werner, malgré les
vagues préventions qu'elle ressentait contre cette jeune
femme, l'avait trouvée belle et charmante, et l'avoua à ses
amies.
   Cette favorable impression s'accrut tous les jours davan-
tage. La ferme résolution qu'avait prise Mme Werner de
rester à l'écart, ne put tenir devant autant de grâce. On
s'approchait de Mme Dermont par politesse pour lui deman-
der de ses nouvelles, et peu à peu elle vous retenait, vous