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DN TABLEAU l.'K MU1U1L0. 259 l'anse d'un grand pot de terre tandis que l'autre montre le ruisseau, son cou tourné, tout son être enfin est plein d'un mouvement si naturel, qu'on croit en voir jaillir la pensée, et qu'il semble qu'on entend ses paroles. — De l'autre côté du tableau, les contrastes sont plus frappants, plus intéressants encore. Un jeune enfant, assis sur un cheval de haute taille, tient un pot vide à la main, et ne peut descendre pour lé remplir. Il n'a auprès de lui ni parents ni amis, il est seul, il pleure. Deux femmes placées devant lui pourraient faci- lement apaiser son chagrin ; car, préoccupées de l'avenir, elles ont rempli de larges vases ; mais elles semblent ne pas entendre ses plaintes. La plus âgée écarte déjà la foule pour mettre en sûreté son précieux fardeau. Vainement sa compagne semble lui dire qu'il n'est pas besoin de se hâter ; on lit dans tous ses traits la prudence craintive et inté- ressée de son sexe et de son âge, on voit qu'elle doute de la longue durée du miracle, et qu'elle s'applaudit d'élre désor- mais par sa prévoyance à l'abri de cette soif terrible dont les souffrances lui sont sans doute trop connues. Cependant, comme pour faire rougir leur égoïsme, un homme dont le visage rayonne d'une bonté charmante partage avec une petite fille l'eau qu'il vient de puiser. Celle-ci se dresse sur la pointe des pieds comme pour sauter de joie, et le remercie d'un regard caressant. Mais rien n'est plus gracieux, plus expressif, plus attachant que les deux derniers groupes que j'ai encore à vous décrire, et qui placés l'un à droite, l'autre à gauche du tableau, fai- saient évidemment pendants l'un à l'autre dans la pensée du peintre. D'un côté, une toute jeune femme tient sur son bras un bambino comparable aux plus jolis de Raphaël. Elle boit à une coupe, et l'enfant voudrait boire aussi. Mais la mère, dout la figure exprime la finesse et une sorte de coquetterie plu- tôt que les sentiments tendres, se détourne pour qu'il ne puisse