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486                         DES APTITUDES.

s'agitaient les plus graves questions de droits et de devoirs
sociaux, il nous faudrait de tout autres dispositions d'esprit
que celles d'hommes absorbés par les intérêts et surtout
désenchantés des doctrines. Les âmes de ce temps étaient,
il semble, plus activement civiques; l'idéal social, plus haut;
les tendances, plus passionnées. Laissons donc hommes et
choses s'enfoncer peu à peu dans ces calmes régions de la
grande histoire, dont l'observateur ne saurait apprécier le
spectacle qu'en tournant le dos, si l'on peut ainsi dire, aux
passions du moment comme aux préoccupations de l'avenir.
Les faits, d'ailleurs , ont parlé plus haut que les hommes :
aux promesses des théories les plus séduisantes ont suc-
cédé les réalités des ré\olutions les plus diverses , et nos
 descendants seuls pourront dire si la liberté y a gagné.
    Pour nous,fidèlesa cet esprit de confraternité tolérante dont
les compagnies littéraires doivent à tous le salutaire exemple,
nous n'avons qu'a nous accorder réciproquement le tardif béné-
fice des bonnes intentions; et puis-je mieux faire a cet égard
que de m'en référer au jugement que mon honorable prédé-
 cesseur porte lui-même sur cette première phase de sa vie,
 dans la préface de son plus important ouvrage? « L'auteur,
 « dit-il, a eu, pour tâche, dans une autre carrière, de re-
 « tracer quotidiennement les faits politiques, non seulement
 « contemporains, mais actuels ; et s'il l'a fait avec ses con-
 « vidions, ses passions et même ses préjugés, il peut dé-
 « clarer dans la sincérité de son âme qu'il n'y a jamais ap-
'« porté de haine contre les personnes (1). »
   Ce jugement, qui fait si largement la part de la critique, a.
d'autant plus de valeur a nos yeux qu'il a été formulé à
une époque où la vie et les pensées de M. Morin avaient
subi une sérieuse et radicale transformation.

  (1) Hist. de Lyon, page iij.