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LE CARTULAIRE D E B O U R S EN BRESSE 275
collationnées, produites au cours de différents procès, pendant les
deux derniers siècles. M. Brossard s'est donc attaché à colliger
tous ces monuments dispersés. Il en a fait un recueil, remar-
quable à tous égards et composé de 177 titres qu'il a rangés
par ordre chronologique. « Mais, dit-il, dans son Avis au lec-
teur, cette diversité dans les provenances compliquait singu-
lièrement la question de l'orthographe ; ainsi, tel titre, d'une
époque reculée, transcrit sur l'original, allait être suivi d'un titre
de la même époque, copié sur une expédition du dix-huitième
siècle. Les différences orthographiques allaient devenir telles
qu'elles devaient jeter le trouble dans l'esprit de tout lecteur
attentif.
« C'est alors que, pour éviter cette bigarrure fâcheuse, après
mûre réflexion et de l'avis de personnes qui s'occupent chez
nous de l'histoire de leur province, il fut décidé de ramener tous
les titres à une orthographe unique, c'est-à -dire à l'ortho-
graphe classique. » Mais que M. Brossard me permette de le lui
dire, qu'il a été bien mal inspiré en faisant subir à tous ces actes
ce fâcheux travestissement ? Qui les reconnaîtra sous cet accou-
trement ? Ne leur a-t-il pas enlevé leur caractère propre, leur
cachet particulier, leur valeur historique, et n'a-t-il pas fait en
cela, comme des collectionneurs ignorants qui, croyant rendre
plus beau un bronze antique, détruisent la patine dont le temps
l'a recouvert et embelli ? Tous les vrais érudits le lui reproche-
ront donc, car il les prive d'un élément important d'étude et de
comparaison, surtout aujourd'hui qu'on s'attache, avec raison, Ã
l'étude si importante de la linguistique à toutes les époques.
Respectons donc nos monuments écrits comme nous devons res-
pecter religieusement tous les autres que chaque siècle nous a
légués.
Le cartulaire de Bourg commence en 1250. Jusqu'alors, cette
localité n'avait été qu'un humble village posé sur les ruines d'une
station romaine et dont le nom même a disparu. Bourg dépendait
de la paroisse de Saînt-Pierre-de-Brou, et les sires de Bagé
étaient ses maîtres. La condition de sa population était la même
que celle des autres villages de la province, et telle que la
féodalité l'avait faite. Était-elle'heureuse? Je ne le dirai pas.