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388 LA REVUE LYONNAISE Avec M. Hignard, nous revenons à la littérature pure. M. de Gérando fils a fait hommage à l'Académie d'un volume contenant les lettres de sa mère qu'il vient de publier. M. Hignard a présenté à ce sujet un rapport où semblent revivre le charme, la grâce sé- rieuse et la noble élégance de Mme de Gérando. M. Gharvériat, dans une courte notice, recherche les origines du journalisme en Allemagne. Les premières années du dix-sep- tième siècle voient naître un grand nombre de gazettes ; d'abord manuscrits, bientôt imprimés, c'étaient simplement des recueils de nouvelles politiques ou commerciales, où l'article de fond n'appa- raissait jamais, où les correspondances venues (avec quelle len- teur I) des principales villes d'alors, faisaient tous les frais de la rédaction; Mais ce qui est la pièce capitale des mémoires de l'Académie, moins par le développement de l'œuvre que par l'intérêt du sujet, l'importance des questions touchées et la valeur littéraire du travail, c'est assurément la Notice sur l'abbé Noirot, par M. Hein- rich, secrétaire général de l'Académie (classe des lettres) et doyen de la Faculté des lettres. C'est une œuvre capitale, c'est encore une œuvre utile et nécessaire. Il y a des mémoires qu'il faut abso- lument sauver de l'oubli auquel elles n'échapperaient pas par elles- mêmes ; ce sont celles de ces héros modestes qui, seulement préoc- cupés de bien faire, n'ont toute leur vie pensé et agi que pour les autres, sans laisser de leur œuvre le moindre monument. Tels sont les maîtres de la sagesse dans le sens antique du mot ; tel fut l'abbé Noirot, professeur de philosophie au lycée de Lyon qui, pendant vingt-cinq ans, a mis, je ne dirai pas toute sa gloire (il n'y pen- sa jamais) mais son unique ambition, non à transmettre ses idées en traités impérissables, mais à former des générations d'esprits droits et vigoureux. « Lesautres, disait l'illustre Victor Cousin, en parlant comme ministre de ses professeurs de philosophie, les au- tres m'envoient des livres, celui-là m'envoie des hommes. » Certes, le souvenir des hommes éminents de cette valeur reste parmi leurs contemporains ; mais peu à peu ce souvenir s'efface ; les générations qui suivent ne connaissent plus que de nom celui dont parlent parfois leurs pères et peuvent rapporter à la gratitude ou aux mirages d'une jeunesse déjà éloignée l'estime singulière et