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      Girard vint donc, en 1829, occuper la tente-pavillon du Pré de Bellecour, et c'est
alors qu'il loua, rue Boissac, 7, un « bas » et deux pièces au troisième étage. Il avait
cédé le café d'Italie à un sieur Noailly pour 65.000 francs, réalisant de ce fait un béné-
fice de 20.000 francs, et depuis il avait encore acheté, sur le quai des Célestins, un
second café qu'il avait revendu peu après et dont le prix, a-t-il dit, ne lui fut jamais
payé.
      La construction du café du Pré de Bellecour avait soulevé une série de protesta-
tions et de conflits. Le journal l'Echo du jour, constate, le I e r juin 1829, qu'il y aura
désormais, sur la place, « un corps de garde pour maintenir l'ordre et un café pour le
troubler » ; que ces deux « cabanes coupent la vue aux promeneurs ». La municipalité
n'a au torisé cette entreprise que pour faire payer une forte patente au cafetier qui
 exploitera le pavillon, mais les confrères de Girard ont signé une pétition pour récla-
mer la suppression du nouvel établissement.
      Les limonadiers du quartier, représentés par le sieur Th. Four, firent si bien que,
sur leur mise en demeure, la Ville dut demander l'autorisation de plaider. Un procès
s'engagea devant le tribunal civil qui se déclara incompétent et les choses en restèrent
là. Mais la municipalité avait affaire à un autre adversaire, Paul-André Sain-
Rousset, baron de Vauxonne, ancien maire de la division du Midi de Lyon, ancien
premier adjoint au maire unique. Comme représentant de Pierre Perrachon de Saint-
 Maurice, acquéreur, en 1661, de la directe de Bellecour. M. Sain-Rousset se préten-
 dait autorisé à empêcher qu'aucun édifice fut élevé sur la place. La Ville, mal infor-
 mée de ses droits, soucieuse peut-être de ménager un de ses anciens magistrats, passa
 avec ce dernier, le 12 août 1829, u n traité aux termes duquel M. Sain-Rousset permet-
 tait à la municipalité de conserver le corps de garde et le café" récemment bâtis, la
 Ville s'interdisant à l'avenir de faire sur la place aucune construction qu'elle quelle fût. 6
       Retardés par ces incidents, les débuts du café du Pré de Bellecour furent des plus
 modestes, et une série d'événements imprévus vinrent causer à son tenancier de sérieux
 préjudices. C'est d'abord la Révolution de Juillet qui vaut aux Girard d'être dénoncés
 comme « carlistes » au nouveau maire, M. Christophe Martin. En 1831, l'émeute de
 novembre. Le corps de garde est détruit et le pavillon pris entre deux feux ; ses habi-
 tants sont restés « à leur poste » et « la mort plane partout » autour d'eux. Trois ans
 plus tard, pendant les journées d'Avril 1834, on se bat de nouveau sur la place ; toutes
 les tables de marbre du café sont brisées. L'état-major de la garnison s'est établi dans
 le café Girard et la troupe campe sous la promenade, au grand dommage des vieux
 tilleuls déjà bien malades. La même année, l'établissement de l'éclairage au gaz fera
 disparaître un grand nombre des survivants en saturant le sous-sol d'émanations
 délétères.


      6. Ce traité fut, depuis, l'origine d'une série de procès entre la Ville et les ayant-droits de Pierre Perra-
chon de Saint-Maurice ; il a été jugé que cette convention n'avait pas pu porter atteinte au principe de
l'inaliénabilité du domaine public et que la vente de la directe de Bellecour en 1661 n'avait pas conféré aux
héritiers du vendeur le droit d'empêcher la Ville d'élever aucune construction sur la place Bellecour,