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LETTRES DE L'ÉCO'LE NORMALE 221 mais j'ai reconnu que ce n'était rien autre chose que les rêves d'un cerveau malade qui n'avait pas le courage de vivre. J'ai travaillé et j'ai prié; maintenant, je suis plus calme, je comprends mieux ce que c'est que la vie, et en même temps je m'y attache, non pas à cause de ses jouis- sances, elles sont peu nombreuses, mais parce que je sens combien il est précieux ce temps si court que Dieu m'a donné pour ma sanctification et pour sa gloire. Je sens que je n'ai encore rien fait pour ces deux buts, et je prie la souveraine bonté de ne pas me prendre maintenant au milieu de ma misère, mais d'attendre que j'aie profité de ses dons, et que je puisse me présenter devant elle les mains pleines. Je ne dis plus comme toi : « Si la vie est une épreuve, on doit la demander courte; si c'est un châtiment, on doit en désirer la fin. » Mais je dis : « Il y a dans le caté- chisme : Pourquoi Dieu nous a-i-il créé tt conservé jusqu'à présent ? — Pour le connaître, l'aimer, le servir, et par ce moyen acquérir la vie éternelle. » Voilà donc pourquoi nous sommes nés : connaître Dieu, aimer Dieu, servir Dieu. Qu'ai-je fait pour cela jusqu'à présent ? Et si Dieu me reti- rait maintenant du monde, quel compte aurai-je à lui rendre des facultés qu-il avait mises en moi, des vingt et une années qu'il m'a laissé passer sur la terre, de la santé, de la force, des maîtres, des occasions qu'il m'a ménagés ? O mon Dieu, ayez pitié de moi, pardonnez-moi ma lâcheté et ma paresse passée, accordez-moi encore le plus de jours possible, afin que je vous connaisse, que je vous aime, que je répande votre nom parmi mes frères, que je travaille à votre gloire, et alors, mais seulement alors, lorsque je serai riche de bonnes œuvres et que j'aurai moins à craindre de votre redoutable justice, lorsque mon corps sera affaibli par les-fatigues et que mon âme aura N° 3. — Mars 1897. jr