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 64                      HENRI HIGNARD

   que tu serais obligé de perdre un temps précieux ; ce temps
  tu pourras l'employer à réfléchir, à méditer ce que tu auras
  lu et le repasser dans ta tête, ou bien à préparer ce que tu
  voudrais écrire, car je crois que tu dois écrire beaucoup ;
  ton style est défectueux de plusieurs manières ; on voit que
  tu n'as pas d'habitude, et il faut l'acquérir. Réfléchis bien à
  tout ce que tu lis; il te viendra probablement des objections
  et ces objections écris-les comme si tu les écrivais à l'auteur
  du livre, c'est-à-dire en les rendant le plus intelligibles que
  possible, de telle sorte que tout le monde en les lisant
  puisse parfaitement comprendre ce que tu voulais dire. Il
 est déjà bien difficile d'avoir des idées ; mais ce n'est pas
 tout, il faut savoir les exprimer pour soi-même et pour les
 autres, et c'est peut être plus difficile encore. Ces deux
 talents ne se supposent pas l'un l'autre. Il y a des gens qui
 qui pensent beaucoup et très bien ; qui savent parfaitement
juger un ouvrage, et en montrer les beautés^et les défauts,
et avec tout cela qui ne savent pas écrire deux mots de
suite. M. Nisard, qui est certainement un homme de mérite,
et dont plusieurs ouvrages sont très estimés, me disait der-
nièrement qu'il n'y a rien de difficile au monde comme
d'écrire vingt lignes qui aient le sens commun. Et cette
vérité qui semble paradoxale, lorsque tu essaieras d'écrire,
tu en sentiras toute la justesse. Ce talent si précieux et si;
rare, ce n'est qu'en écrivant beaucoup qu'on peut l'acquérir.
Mais il ne faut pas se contenter de jeter ses idées sur le
papier, il faut se rappeler que écrire, c'est s'adresser à quel-
qu'un absent à qui on veut communiquer un certain nom-
bre de convictions, d'opinions, de doutes, de craintes,
d'espérances, etc. Par conséquent, on n'écrit pas pour soi,
mais pour ce correspondant, qui, pour les auteurs qui font
imprimer leurs ouvrages, est le public. Il ne.suffit donc pas