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                 LETTRES DE L'ÉCOLE NORMALE                  65

que l'on soit content de ce que l'on a écrit, il faut voir si
cette personne ou le public en pourraient être contents ;
si cela les convaincrait, les intéresserait, leur apprendrait
véritablement quelque chose ; et pour cela, il faut le relire
en oubliant que l'on en est l'auteur, et comme on relit un
ouvrage d'un autre. C'est ainsi, et seulement ainsi, que l'on
peut arriver à faire quelque chose de passable. Ainsi, mon
ami, lorsqu'en lisant tu as quelque objection à faire à
l'auteur du livre, médite-la bien, et. écris-la, comme situ
devais la lui envoyer. Tu peux d'autres fois, après avoir
bien compris un raisonnement de l'auteur, fermer le livre,
et écrire ces idées comme si elles étaient de toi. Attache-
toi surtout à ce que ta phrase soit une expression fidèle de
ta pensée, et qu'il n'y ait rien de plus dans l'une que
dans l'autre. Demande-toi sur chaque mot, s'il est néces-
saire, s'il est à sa place ; s'il ne faudrait pas le retrancher
 ou le mettre ailleurs. Quand tu ne ferais cet exercice
que très rarement, par exemple, que tu n'écrirais qu'un
petit morceau de deux ou trois pages tous les mois, tu
 pourrais en retirer de grands résultats. Mon ami, au com-
 mencement de cette année, j'ai bien pensé à toi. Dans quel-
 ques mois tu auras 17 ans; dans 12 jours j'en aurai 21 ;
 nous voilà des hommes, et cependant, ô mon Dieu, comme
 notre conduite est encore éloignée de ce que doit être celle
 d'un homme! J'ai prié Dieu, mon ami, qu'il nous donne à
 tous deux sa sagesse, parce qu'il a dit que celui qui a sa
 sagesse a tout le reste. Je lui ai promis que dans cette nou-
 velle année qui commençait nous ferions plus d'efforts que
 par le passé pour nous montrer ses enfants. J'ai prié aussi
 pour nos parents ; ces bons parents qui méritent de notre
 part tant de reconnaissance et d'amour. Je suis réduit à
 prier pour eux, mais toi, mon ami, qui a l'inestimable avan-
  N° 1.—Janvier 1897,                                    r